« Nous avons fait un Miroir du football parce qu’il était nécessaire de le faire, tant nous semblait indigent ce qu’on offrait aux amoureux du ballon rond. L’idée était bonne puisqu’elle a été plagiée sans vergogne. Mais elle était bonne surtout parce que les lecteurs nous l’ont dit. Et en nous le disant, nombre d’entre eux ajoutaient : "Pourquoi ne faites-vous pas aussi un Miroir du cyclisme ?" »
Les premières lignes de l’éditorial de Maurice Vidal dans le premier numéro du nouveau bimestriel « Miroir du cyclisme », qui voit le jour en 1960, disent déjà l’ambition d’un magazine qui paraîtra de 1960 à 1994 et a marqué l’histoire de la presse sportive.
Le renouveau de la presse sportive communiste à la Libération
Face à « l’indigence » de ce qui était offert aux amoureux du ballon rond et du vélo dans L’Équipe, successeur dès 1946 de L’Auto, interdit à la Libération pour avoir continué de paraître sous l’occupation et pour avoir diffusé des communiqués de la propagande allemande, les communistes créent dès 1946 le quotidien Sports (1946-1948), héritier de Sport ouvrier puis de Sport, l’organe de la Fédération sportive du travail (FST) devenue FSGT en 1934.
En parallèle du quotidien est créé l’hebdomadaire Miroir-Sprint, le reflet du sport qui continuera de paraître jusqu’en 1971.
Né en 1919, résistant, membre du bureau politique de l’Union de la jeunesse républicaine de France (UJRF) de 1946 à 1948 et passionné de sport, Maurice Vidal publie ses premières chroniques sportives dans L’Avant-Garde avant de devenir journaliste sportif pour Sports puis pour Miroir-Sprint dont il est nommé directeur dès 1949.
Hebdomadaire omnisports, Miroir-Sprint crée au tournant des années 1960 quatre magazines mensuels spécialisés, dont la direction incombe à Maurice Vidal : Miroir du football, Miroir du rugby, Miroir de l’athlétisme et Miroir du cyclisme.
Miroir du football voit le jour en octobre 1958, d’abord comme hors-série de Miroir-Sprint avec un numéro spécial consacré à Raymond Kopa et à la coupe du monde de 1958. Devenu mensuel en janvier 1960, le magazine disparaîtra le 26 septembre 1979. Son rédacteur en chef, le journaliste sportif François Thébaud, était un défenseur du beau jeu et un grand admirateur du football sud-américain. Intransigeant, critique du chauvinisme ou du jeu stéphanois de l’époque, à rebours des articles louangeurs de L’Équipe et de France football, Miroir du football a marqué les esprits et sans doute influencé en partie un journal comme So Foot.
Miroir du football est devenu aujourd’hui un objet d’histoire. L’association des amis de François Thébaud (AMFT) entretient la mémoire du journaliste, décédé en 2008, et anime le site Miroir du football.
Miroir du football et Miroir du cyclisme, objets d’histoire
Le 16 novembre 2023, une journée d’étude consacrée à Miroir du football s’est tenue à la Maison des Sciences de l’Homme (MSH) de Dijon en présence d’une dizaine de chercheurs issus de six universités différentes (Université de Bourgogne, Université d’Artois, Université de Franche-Comté, Université de Rennes, Université de Nice et Université de la Sarre en Allemagne).
La MSH de Dijon, qui abrite le portail PANDOR, qui permet de consulter les archives du Parti communiste depuis sa fondation, notamment les fonds de Moscou, mais aussi les brochures de la Bibliothèque marxiste de Paris et des collections complètes de revues éditées par le PCF comme L’École et la nation, envisage désormais de numériser à moyen terme toute la collection de Miroir du football pour la rendre accessible aux chercheurs et aux étudiants.
Toute la collection de Miroir du cyclisme est d’ores et déjà numérisée et accessible gratuitement en ligne sur PANDOR. Chercheurs et passionnés de vélo ont désormais accès à plus de trente années et 25 000 pages d’actualités sportives qui témoignent de l’ambition des communistes d’apporter un autre regard sur le sport.