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Centres de Santé pour tous

« On embauche même des médecins... »

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Santé Filieris

Entretien avec Nicolas Blanchart, directeur régional de Filieris.

Comment mieux répondre aux besoins de santé de la population ? Par une meilleure organisation et une utilisation plus efficiente des moyens, répondent invariablement les gouvernements depuis des décennies.

Par plus de moyens, répondent en gros les professionnels de santé, les syndicats, certaines organisations politiques, une majorité d’élus, l’Association des Communes Minières et les associations d’usagers.

Parce qu’on aura beau retourner la question dans tous les sens, quand on doit attendre des semaines pour avoir un rendez-vous médical, voire des mois pour une opération à réaliser en urgence, (!) aucun tableau Excel ne fera qu’un médecin (ou autre professionnel) fasse le travail de trois ou quatre.

« On a fait sauter le numerus clausus » répètent à l’envi les défenseurs de la politique gouvernementale. Et effectivement, la faculté de Lille va accueillir 17 % d’étudiants de plus en médecine. Pas rien, 17 %... sauf que ça fait tout juste une quinzaine de médecins ! Sans régler pour toute la Région des Hauts-de-France un des problèmes de fond - le manque de professionnels de santé - le collectif Santé qui s’est créé dans le Pas-de-Calais (et une partie du Nord) apporte malgré tout des solutions.

Répondre aux besoins, ça coûte cher !

Dans l’ex-Bassin Minier, elles s’appuient sur le réseau Filieris, héritier de la Sécurité sociale Minière. Mais comment prétendre apporter des réponses pérennes lorsqu’on connaît soi-même des difficultés financières ?

Liberté-Actus : Vous connaissez des déficits - 18 millions d’euros annuels pour les centres de santé au niveau national -, vous vous désengagez de votre patrimoine immobilier et on peut craindre une restructuration à la baisse.

Nicolas Blanchart (directeur régional Filieris) : Oui, mais c’est une situation que nous sommes en train de régler. Nous avons hérité d’un énorme patrimoine, vieillissant et nos financements ne sont plus les mêmes. Nous avons privilégié le maintien, voire le développement d’une médecine de proximité qui réponde aux besoins de la population, y compris non affiliée au régime minier ; et ces besoins augmentent et sont de nature nouvelle pour certains. Ça coûte cher ! .

L.A : Des organisations syndicales et politiques, habituellement pas tendres avec le secteur privé, même de type associatif, souhaitent voir Filieris intégrée à un grand plan de satisfaction des besoins de santé. Comment ferez-vous avec ces charges et vos intentions sociales ?

N.B : Nous faisons effectivement le choix de nous séparer de notre patrimoine immobilier. Et nous nouons des partenariats avec des collectivités. Pas moins de 14 projets sont en cours visant à transférer les Centres de santé existants, en les regroupant parfois dans de nouveaux locaux, construits ou réhabilités par des communes ou des organismes bailleurs. C’est un investissement considérable pour les collectivités, même si la Région (pour 50 %) et l’État (pour 25 à 30 %) vont subventionner les projets.

Le partenariat plutôt que la concurrence

L.A : Et ça suffit ?

N.B : Ça nous permet non seulement de poursuivre notre politique, mais aussi de l’étendre. En résumé : nous pratiquons de la médecine de ville, généraliste et spécialisée ; sans dépassement d’honoraires, aucune avance de frais ; nous sommes ouverts à toute la population, y compris chaque samedi matin. Nous pratiquons les Soins Médicaux et de Réadaptation, les soins en Ehpad, les soins, l’aide et l’accompagnement à domicile pour les personnes âgées et celles en situation de handicap... Nous appareillons les gens, les traitons, les suivons...avec nos médecins, infirmiers, dentistes, ophtalmos, pharmaciens. Nous avons 6 laboratoires d’analyses dans les Hauts-de-France. Nous faisons vivre 6 services de soins médicaux et de réadaptation, 3 Ehpad, 1 Unité de soins Longue Durée, 3 résidences autonomie, 1 service polyvalent d’aide et de soins à domicile... Nous participons aussi à des actions d’insertion sociale pour trouver des ressources humaines parmi la population. Le partenariat avec les collectivités va nous permettre d’étendre encore plus notre champ d’intervention, y compris géographiquement.

L.A : Vous entrez en concurrence avec le secteur privé ?

N.B : Non. Ce n’est un secret pour personne qu’il manque de médecins, de personnels de santé, de structures de soins. Les urgences des hôpitaux sont débordées, il faut parfois des mois pour se faire soigner les dents, avoir des lunettes. Mieux, nous embauchons des médecins... ».

Créer les conditions d’attirer des médecins

L.A : … non, on n’en trouve pas !

N.B : … ben si. Ce n’est pas simple, bien sûr, mais il y a des médecins prêts à devenir salariés. Depuis 2023, trois de nos médecins sont partis, et nous en avons embauché quinze ! Le tout est de savoir leur offrir un environnement qui leur convienne. Le temps où le médecin et le notaire étaient les plus riches de la ville est révolu. Un médecin gagne bien sa vie, pour beaucoup, mais ça n’a plus rien à voir avec des situations d’il y a quelques décennies. En plus, il y a toutes les démarches administratives, la comptabilité, le secrétariat, l’isolement du médecin, le besoin de se mettre à niveau en permanence, etc... Nous, nous offrons un salaire très correct, avec les avantages du salariat : 35 h, heures supplémentaires, congés payés, assurance chômage, maladie et risques professionnels, secrétariat, comptabilité, etc... Le toubib a juste à se préoccuper de soigner. Il est dans un environnement porteur avec ses confrères et consœurs, avec les autres professionnels de Filieris et aussi avec tous ceux des hôpitaux et autres lieux de santé avec qui nous nouons des partenariats.

Liberté-Actus : … avec des hôpitaux ?

N.B : … oui et ça marche dans les deux sens. Par exemple, avec les hôpitaux d’Hénin-Beaumont, Lens, Béthune-Beuvry et La Bassée, lorsque nous avons une interrogation sur l’état d’un patient, le médecin Filieris envoie une photo et son avis à l’hôpital. Sous 24h, l’hôpital lui renvoie un diagnostic éclairé. D’un autre côté, pour éviter les surcharges à l’hôpital, Filieris pratique la consultation de patients opérables et l’hôpital récupère le patient pour l’intervention chirurgicale. Et nous voulons développer cette pratique partout. Ça va demander beaucoup plus de personnels et de médecins. Pour revenir sur ça, nous travaillons avec les facultés, nous participons à des évènements professionnels pour trouver de nouveaux médecins et nous militons pour que le système éducatif suscite des vocations.

Réduire encore les disparités

L.A : Pour finir, vous parliez aussi d’extension géographique.

N.B : Oui, nous n’irons pas partout. Nous avons notre particularité liée aux bassins miniers, en Hauts-de-France comme en Occitanie par exemple. Mais nous pensons raisonnable d’étendre un peu nos zones d’intervention aux limites du Bassin Minier. Il y a de grandes disparités dans les zones voisines des anciennes grandes communes minières. Autour de Bruay ou Auchel par exemple. C’est la fin du Bassin minier Ouest avec la campagne partout, de petites communes où on manque de médecins. Et il y a d’autres endroits avec les mêmes problèmes. Seclin dans le Nord ou Berles-au-Bois au sud-Ouest d’Arras, ce n’est pas le Bassin Minier, mais il y a des proximités. Ce serait bête de priver une population de possibilités de se soigner pour 10/15 minutes de route en plus. Avec nos projets, intégrés à ceux des collectifs santé - comme la création d’un Centre Hospitalier Universitaire multipolaire - on peut être content parce que c’est la démonstration que notre modèle de Santé - « des Mines », même si elles sont fermées - n’est vraiment pas dépassé. Ce que nous construisons, c’est l’avenir ! ».

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