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Centre hospitalier de Lens

La pédopsychiatrie en manque de médecins

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Mise à jour le 5 juillet 2024
Temps de lecture : 5 minutes

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Santé

Statu quo médical, recherche par la direction de médecins pédopsychiatres, aucune intention de la direction de réduire la voilure en matière de prise en charge. Voilà, après plus de 15 jours de grève du service pédopsychiatrique du centre hospitalier de Lens, où en sont les négociations entre le syndicat FO et la direction.

Si le mouvement est suspendu à partir de ce jeudi soir 30 mai, le secrétaire général adjoint de FO (syndicat majoritaire) se montre dubitatif. Patrice Ramillon doit revoir l’équipe médicale du service ce lundi 3 juin pour faire le point de la situation et décider des suites à donner au mouvement. Pour sa part, la direction de l’hôpital a rendez-vous avec l’Agence régionale de la santé (ARS) le 17 juin.

En attendant, la situation demeure particulièrement tendue. D’ailleurs, le service psychiatrie a apporté son soutien aux grévistes.

Un maillon essentiel de la prévention

Sur les six médecins que comptait le service pédopsychiatrie, quatre ont démissionné ces six derniers mois en raison du manque de reconnaissance de la direction à l’égard de leur travail et de leurs préoccupations. Les salariés, représentés par le syndicat FO, réclament le recrutement urgent de médecins pédopsychiatres, l’accès aux soins pour tous les patients et leurs familles, la pérennité des postes de l’ensemble des professionnels du service.

« Nous sommes un maillon essentiel de la prévention, explique une psychomotricienne. Quand les troubles de santé d’un enfant de moins de 14 ans sont mal pris en charge, ils risquent de devenir chroniques.  »

Les pédopsychiatres sont spécialisés dans le soin des troubles mentaux des enfants et des adolescents. La demande s’est beaucoup complexifiée et diversifiée : aux troubles majeurs du comportement s’ajoutent aujourd’hui les troubles de l’attention, du comportement alimentaire, l’autisme, l’hyperactivité, la dépression, sans compter les comportements suicidaires. « Notre rôle, qu’il faut bien distinguer de la psychiatrie pour adultes, consiste à empêcher que la souffrance de l’enfant ou de l’adolescent se cristallise », assure cette psychomotricienne.

C’est bien pour cela qu’il faut des médecins en nombre suffisant. « Il ne sert à rien de recruter des fantassins sur la ligne de front, surtout s’ils sont seuls », résume Patrice Ramillon. «  Or, c’est précisément ce que fait la direction jusqu’à présent. Elle injecte beaucoup de moyens paramédicaux, mais c’est trop tard. Elle recrute des psychologues, mais en l’absence de médecins, cela ne sert à rien.  »

Sur un effectif de 70 professionnels, tous corps confondus, le service comptait six médecins. Or, depuis la crise du Covid, les besoins ont augmenté de 40 %. Il était compliqué de faire face sans recruter. Aujourd’hui, après le départ de quatre praticiens, ils ne sont plus que deux, et encore, ils ne sont pas à temps complet, pour suivre 2400 patients. C’est mission impossible.

«  Durant ces deux semaines de grève », raconte le syndicaliste, « la direction n’a pas su répondre à nos revendications : ’’ On s’y penche, soyez patients, ce n’est pas si facile…’’ Nous ne pouvons nous contenter de telles réponses laconiques. »

Les risques d’une telle carence sont grands. En premier lieu, l’équipe du service pédopsychiatrique craint un tri des patients qui s’ajouterait à la priorisation existante (pour les enfants envoyés par l’aide à l’enfance par exemple). Il serait question de ne plus prendre en charge les enfants au-dessus de 12 ans. Ensuite, elle a peur que l’ouverture de nouvelles unités prévues (comme un hôpital de jour mères-enfants) ne se fasse pas.

Bombe sanitaire

Ce n’est pas tout. L’attractivité du centre hospitalier de Lens pourrait bien souffrir de cette pénurie de moyens et faire fuir les médecins ailleurs. C’est déjà en partie vrai. Depuis six mois, les internes évitent l’hôpital de Lens. «  L’hôpital ne peut se réduire à la médecine, à la chirurgie et à l’obstétrique. Sinon, nous ne serons plus le premier centre hospitalier du Pas-de-Calais et nous ferions la même chose que le groupe privé Ramsay  », dénonce Patrice Ramillon.

Pour Céline, venue apporter son soutien aux grévistes, le problème remonte plus loin encore. « J’étais infirmière dans cet hôpital en 2017 », confie-t-elle. «  Il y avait huit médecins et tous sont partis au fur et à mesure. Nous étions malmenés. Moi-même, je suis partie suite à un burn out. Je suis restée en arrêt de travail pendant deux ans. » Aujourd’hui, elle a quitté l’univers hospitalier. Elle applique ses compétences acquises en pédopsychiatrie dans la médecine scolaire. Elle est actuellement surveillante dans un collège et se voit un avenir en tant qu’infirmière scolaire. «  Mon salaire est inférieur à ce que je gagnais à l’hôpital. Mais je m’épanouis beaucoup mieux. »

En attendant ce qu’il va ressortir de la rencontre entre la direction de l’hôpital et l’ARS, la sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly apporte son soutien à l’équipe du service pédopsychiatrique. Dans un communiqué, elle estime que « c’est à l’État d’apporter les moyens nécessaires pour répondre à la crise des recrutements médicaux et il y a urgence face à une bombe sanitaire. »

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