Les taxes imposées aux mutuelles sont ainsi passées en 25 ans de 1,75 % à 16,07 %. Cotiser pour sa santé est plus taxé que de consommer un néfaste hamburger dont la TVA n’est que de 5,5 %.
Par Nicolas Pomiès, vice-président de Mutuale, la solidarité mutualiste
Un financement opaque et imposé sans concertation
Cela s’ajoute aux récentes mesures financées par les cotisations aux complémentaires santé qui ne font qu’accentuer les difficultés d’accès aux soins comme :
- 70 % de la réforme du 100 % santé (dentaire, optique, audioprothèse)
- La hausse de 10 % sur les soins dentaires, avec un ticket modérateur passant de 30 % à 40 % en 2023
- Le forfait patient urgences, soit 18 € à chaque passage aux urgences sans hospitalisation
Mais cela ne suffisait pas puisqu’une nouvelle ponction sur les cotisations vient de tomber !
Il est annoncé que dès le 1er avril 2025, les examens bucco-dentaires de prévention pour les assurés sociaux de 3 à 24 ans (programme « M’T dents ») font l’objet de trois changements qui ont un impact sur tous les contrats responsables.
Ces examens sont désormais :
- Annuels et non plus triennaux ;
- Cofinancés par les Organismes de complémentaire à l’Assurance maladie (OCAM) à hauteur du Ticket Modérateur (TM) fixé à 40 % (auparavant, c’était du 100 % sécu)
- Payables par tiers payant intégral (ce qui coute aussi auxdits organismes), de même que les soins dentaires réalisés suite aux contrôles de l’état dentaire dans les six mois suivants (sauf inlay-onlay ou soins prothétiques et d’orthopédie dento-faciale).
Le cahier des charges du contrat responsable fixé par l’article L. 871-1 du Code de la Sécurité sociale est ainsi modifié.
Reconstruire une Sécurité sociale solidaire et efficace
Si cette surveillance de l’état dentaire de la jeune population est incontestablement nécessaire, son financement sans concertation avec les complémentaires santés est détestable. Ces nouvelles dépenses seront financées par les cotisations aux mutuelles.
Or les mutuelles et autres organismes de complémentaire santé sont tenues par les directives assurantielles européennes de faire des prévisions de solvabilité sur plusieurs années. Changer encore la règle du jeu à la fin du premier trimestre n’est pas une sinécure.
Le mouvement mutualiste passe son temps à s’adapter aux politiques de reculs de la Sécurité sociale et à rendre des comptes sur sa gestion auprès des autorités de contrôle française (ACPR) et européenne (EIOPA).
Sa véritable mission de prévention et de création d’œuvres sanitaires et sociales prévue en 1945 est empêchée.
Les services de soins et d’accompagnements mutualistes (SSAM) peinent à maintenir leurs activités dans l’environnement marchand qu’est devenu la santé.
C’est ainsi que le brillantissime Institut Mutualiste Montsouris qui déploie des protocoles thérapeutiques de pointe contre certains cancers, et ce sans dépassements d’honoraire, se retrouve en redressement judiciaire. Les mutuelles se débattent pour trouver des solutions parfois désolantes comme celle qui a consisté à délocaliser à Madagascar ou en Chine la production des prothèses dentaires mises en bouche dans ces centres de santé.
Il n’est plus possible d’accepter sans broncher les reculs permanents de la Sécurité sociale. D’autant que de bien pires mesures sont dans les cartons de Bercy comme celle du déremboursement partiel par la sécu de la prise en charge des Affections longue durée (ALD).
Il est nécessaire de rebâtir la Sécurité sociale dirigée par les assurés sociaux et financée par les cotisations sociales pour que les mutuelles se consacrent à 100 % sur leurs missions premières comme le revendiquent les mutuelles de travailleurs comme Mutuale.