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Littoral Nord – Pas-de-Calais

Les migrants et les associations face aux menaces de l’extrême droite

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Extrême droite Calais

Entre Grande-Synthe et Calais, les associations d’aide aux migrants constatent une recrudescence des violences racistes. Dans un contexte où les candidats à l’embarquement pour le Royaume-Uni sont de plus en plus déterminés.

Utopia 56 est une des nombreuses associations d’aide aux migrants qui agissent sur le littoral Nord – Pas-de-Calais. Elle possède deux antennes (sur 6 en France) à Grande-Synthe (près de Dunkerque) et à Calais. Régulièrement, ses équipes font des maraudes pour répondre aux besoins urgents des personnes en exil et qui tentent le passage vers l’Angleterre. « Nous les récupérons quant elles ont fait une tentative ratée. Elles sont mouillées et risquent l’hypothermie (surtout en hiver après avoir séjourné dans l’eau glacée – ndlr), ou lorsqu’elles sont victimes de violences policières. Nous les rhabillons et nous déclenchons un protocole au niveau de la Préfecture du Pas-de-Calais pour leur trouver un hébergement. ».

Coordinatrice de l’association, Angèle Vettorello laisse parler son expérience. La situation des migrants candidats à la traversée du détroit du Pas-de-Calais ne fait que se détériorer et les bénévoles d’Utopia 56 (une trentaine pour six salariés) s’adaptent et ont étendu leur action jusqu’à la baie d’Authie.

L’intrusion de l’extrême droite anglaise

Mais ce jour-là, sur le littoral de Gravelines, la maraude qu’effectuent Angèle et son petit groupe va connaître un épisode inédit. « Nous sommes tombés sur trois personnes qui se sont présentées comme journalistes anglais. Ils étaient chacun munis d’une caméra, mais ils avaient une allure étonnante. » Tous avaient le visage partiellement dissimulé par, qui un cache-cou, qui une capuche, qui une casquette. La conversation entre les deux groupes s’engage et dégénère très vite. « Ils ont rapidement tenu des propos xénophobes, racistes, violents contre les migrants, mais aussi contre ceux qui les aident. » se souvient Angèle. Ils ont aussi filmé les échanges. Les membres d’Utopia 56 s’en sont aperçu lorsque les vidéos de cette interaction ont été publiées sur internet, via des réseaux sociaux, avec des commentaires racistes et haineux, montrant les visages non floutés de leurs interlocuteurs et appelant à la chasse aux migrants. « Ils nous ont dit qu’ils voulaient savoir comment on utilise l’argent des contribuables britanniques et ont annoncé leur intention de venir à Calais pour empêcher les bateaux de migrants de prendre la mer. "Ici, ont-ils dit, ce sont maintenant nos putains de plages" ».

Parmi ces trois militants se trouvait l’activiste britannique d’extrême droite Alan Leggett. Au Royaume-Uni, il est suivi par 140 000 personnes sur son compte X, « Active Patriot ». Pour l’heure, son intention de revenir sur le littoral français pour chasser le migrant a échoué. Placé en garde à vue en Angleterre, il a été privé de passeport par les autorités.

« Des militants anglais étaient déjà venus à Calais, mais par avec ce genre d’appel », témoigne la coordinatrice d’Utopia 56. L’action de ces activistes s’est déroulée avant même les émeutes racistes qui se sont produites à compter de fin juillet, au Royaume-Uni. Elle ne préjuge rien de bon dans le contexte actuel. D’autant que de ce côté de la Manche, l’extrême droite se montre tout aussi active. Les élections européennes et législatives leur ont donné encore plus d’audace. Menaces et intimidations auprès des bénévoles associatifs, contamination d’un point d’eau avec un liquide chimique, jets de pierres, poursuite en voiture, le 2 juillet, d’un groupe de Soudanais entraînant l’hospitalisation de l’un d’entre eux. L’un des agresseurs a d’ailleurs été condamné à 18 mois de prison dont 8 mois ferme.

Le député RN se met en scène

Il n’empêche, nouvellement élu député RN à Calais (7ᵉ circonscription du Pas-de-Calais), Marc de Fleurian s’est mis en scène, dans des vidéos diffusées sur le net, devant des campements d’exilés, en tenant des propos racistes et en assimilant les migrants à des criminels. Son prédécesseur, le LR Pierre-Henri Dumont développait déjà une ligne très dure à l’encontre des personnes migrantes, une ligne soutenue depuis longtemps par la maire de Calais Natacha Bouchard. Mais à présent, un nouveau palier est franchi.

Lors d’une cérémonie d’hommage aux victimes migrantes

À « L’Auberge des Migrants », autre association incontournable d’aide aux migrants, Flore Judet ne dit pas autre chose. La recrudescence des violences et du racisme, l’entrée en scène de l’extrême droite britannique, les menaces qui pèsent à la fois sur les personnes qui veulent traverser et les bénévoles associatifs (pour la plupart des jeunes) génèrent du stress et ajoutent à la difficulté. Comme sa collègue d’Utopia 56, Flore redoute le futur choix d’Emmanuel Macron pour le poste de Matignon. Le nom de Bernard Cazeneuve, l’ex ministre socialiste qui avait démantelé la grande jungle de Calais et avait initié la lutte contre les points de fixation des migrants, n’est pas fait pour rassurer.

Pendant ce temps, le nombre de décès en tentant de gagner les côtes anglaises ne fait que croître. On compte 23 morts depuis janvier. Nous y reviendrons dans un prochain article.

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