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L'assassinat de La Grand-Combe

Un crime odieux qui ne doit pas faire l’objet de récupération politique

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Justice Religion

L’assassinat d’Aboubakar Cissé, vendredi 25 avril à l’intérieur de la mosquée de La Grand-Combe (Gard) est révoltant. À l’image, par exemple, de celui du père Hamel, tué lui aussi sur son lieu de culte, le 26 juillet 2016 à Saint-Étienne-du-Rouvray. Mais pourquoi transformer l’hommage au jeune Cissé (et la dénonciation du crime) en polémique, en bataille sémantique et, pour finir, en haine ?

Mélenchon, ému aux larmes face au témoignage d’une musulmane assurant qu’elle ne se sent plus en sécurité en France, et Rima Hassan qui, décevante au possible, s’en prend à la maire communiste de La Grand-Combe parce qu’elle n’a pas assisté à la marche blanche, organisée dimanche dans sa commune, en hommage à Aboubakar Cissé. Un membre de LFI, dans la même séquence, qui accuse cette maire, Laurence Baldit, de « racisme ». Un autre, député, lui reproche d’incarner une « islamophobie d’État ».

Et puis, l’eurodéputée Rima Hassan, encore elle, qui s’attaque au secrétaire national du PCF Fabien Roussel parce qu’il préfèrerait l’expression « anti-musulmans » à celle d’ « islamophobe ». Peut-être n’avait-elle pas lu le communiqué de ce dernier, publié le 27 avril, dans lequel il dénonce la « haine anti-musulmans » qui serait à l’origine de l’odieux assassinat d’Aboubakar Cissé, mais qui, quelques lignes plus loin, écrit que « l’auteur des faits filmés (…) ne laisse aucun doute sur le caractère islamophobe de ses actes ».

L’invective plutôt que l’hommage

Les manifestations organisées à Paris, dimanche dernier, et le lendemain à Lille, ce lundi soir 28 avril, ont quant à elle préféré l’invective (contre le socialiste Jérôme Guedj à Paris, traité de « sioniste », et contre la députée macroniste Violette Spillebout, à Lille) à l’hommage et à la dénonciation du racisme.

À Lille, il aura fallu attendre longtemps pour qu’un organisateur fasse respecter une minute de silence. Auparavant, le rassemblement avait commencé et s’était poursuivi aux cris de « Israël assassin, Spillebout complice ». Vertement invitée à quitter la place, cette dernière est restée de marbre et, par la suite, a eu beau jeu d’écrire un communiqué dans lequel elle accuse « certains groupes [qui], en agissant ainsi, ne font que nourrir la division et l’incompréhension. Ils ne défendent ni la mémoire d’Aboubakar Cissé, ni la cause qu’ils prétendent défendre. Ils ne font que renforcer les fractures de notre société et affaiblir le tissu républicain. »

S’en tenir aux faits

La récupération politique par LFI et certains partis d’extrême gauche d’un fait aussi odieux que l’assassinat d’un jeune par un autre jeune n’a d’égale que la récupération de ce même fait par l’extrême droite et la gêne évidente montrée par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Celui qui est aussi le ministre des Cultes a mis deux jours avant de décider de se rendre dans le Gard. Encore n’est-il même pas allé dans la commune de La Grand-Combe où, pour finir, la marche blanche a réuni environ 2000 personnes. Même si elle avait été organisée sans concertation ni avec la mosquée, ni avec la maire Laurence Baldit.

Car enfin, peut-être pour une fois, pourrait-on s’en tenir aux simples faits. Vendredi matin, un jeune musulman de 23 ans, venu pour faire le ménage à la mosquée avant de prier, a été tué par un autre jeune, sans doute déséquilibré, qui l’a frappé d’une quarantaine de coups de couteau. Filmant sa victime agonisante, il s’est félicité de l’avoir « fait » et a prononcé des termes anti-musulmans. Cet acte suit l’assassinat d’une jeune lycéenne, à Nantes, par un jeune armé d’un couteau, lui aussi sans doute déséquilibré, et clamant son admiration pour Hitler.

Ce lundi soir à Lille, s’il n’y avait eu ces invectives et autres injures contre une députée, fut-elle macroniste, sans doute les propos de la LDH, de la représentante de l’AFPS (rappelant que la lutte pour la Palestine passe par une lutte anti-raciste) et du représentant du comité des sans-papiers du Nord auraient été davantage audibles.

Dans l’Union européenne, 47 % des musulmans victimes de racisme

Car le racisme anti-musulman est une réalité. L’islamophobie qui sert l’extrême droite est tout aussi réelle. Le récent incendie de la mosquée de Jargeau, dans le Loiret, les coups de feu, en mars, sur le local d’une association franco-maghrébine, à Morteau (dans le Doubs) le démontrent clairement. Pire, une étude de l’Agence européenne des droits fondamentaux, publiée en octobre 2024, révèle que 47% des musulmans vivant dans l’Union européenne disent subir des discriminations au quotidien. Ce chiffre était de 39% en 2016. En Autriche, où l’extrême droite (FPÖ) est arrivée en tête des législatives en 2024 et vient de tripler ses résultats aux municipales de Vienne, 71% des musulmans s’estiment victimes de racisme et d’islamophobie. Ils sont 68% en Allemagne et 39% en France.

On connaît la politique de notre ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau et son rejet des musulmans qu’il considère pratiquement comme des ennemis de l’intérieur. On ne peut ignorer les promesses du Rassemblement national s’il parvenait au pouvoir. Il importe donc de bien prendre le temps d’analyser les crimes racistes, quels qu’ils soient, ceux liés à la haine des musulmans et à l’islamophobie pour faire barrage à ce monstre épouvantable. Il importe, comme l’a exprimé une syndicaliste de Sud Éducation, lors du rassemblement lillois, de ne rien laisser passer, nulle part, en termes de racisme.

Raison de plus pour ne pas laisser la droite et l’extrême droite s’emparer du sujet pour mieux l’instrumentaliser. Raison de plus pour taire les querelles contre-productives au sein de la gauche.

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