Après avoir volontairement bloqué la négociation annuelle obligatoire (NAO) en proposant la suppression ou la diminution d’avantages sociaux, la direction d’Auchan s’est déclarée favorable à un retour aux discussions en septembre prochain. Pas question cependant de revenir sur la NAO, il s’agirait juste d’une clause de revoyure pour faire un point d’étape économique et voir si une révision salariale pouvait être envisagée.
Mouvement suspendu mais la solidarité demeure
Le nouveau représentant du clan Mulliez a accepté de ne pas remettre en cause la ristourne de 15 % dont bénéficient les salariés sur leurs achats. On se doute que ce n’est pas par bonté d’âme, et qu’il en serait advenu autrement si les salariés n’avaient pas fait grève...
L’Intersyndicale [1] d’Auchan, après avoir consulté ses sections syndicales de base, a donc décidé de suspendre le mouvement, mais reste « unie et solidaire dans l’intérêt général ». Elle annonce cependant soutenir toutes les initiatives locales, tant sur les salaires que les conditions de travail qui pourraient être menées.
En effet, derrière le galimatias pseudo-professionnel du nouveau président exécutif, Guillaume Darrasse, également directeur général délégué du groupe au niveau mondial, se cachent de sombres perspectives.
Sa mission est de redresser l’entreprise. Or, après 8 semaines de présence, il a constaté que « les magasins ne sont pas bien tenus, pas pleins et accusent trop de rupture ». Conséquence durable, « une perte de 300.000 clients, un indice de prix à 108 (sur 100) par rapport à Leclerc et une perte de 250 millions de cash par rapport à l’année dernière » relate l’intersyndicale.
Quelles décisions pas simples à prendre ?
Ce qui devrait l’amener à prendre « des décisions pas simples (…) comme remettre le principe de responsabilité au cœur des décisions pour garantir le service rendu aux clients... ». Suit un baragouin sur la « symétrie des attentions », « engager un alignement dans toutes les entreprises » et « réparer la panne du modèle social ».
De la novlangue technocratique pur jus pour ne pas remettre en cause clairement la politique de la direction d’Auchan et son nouveau virage. Ce dernier a été pris il y a un an lorsqu’elle décidait de taper sur ses salariés et ses clients et en décidant de reprendre et de relancer les anciens Casino.
S’en est suivie une désorganisation dans les magasins, « mal tenus » depuis. En effet, les plans de la direction semblaient rationnels sur les tableaux Excel, mais ils se révélèrent d’une absurdité complète sur le terrain. Ce qu’avait à l’époque dénoncé la CGT Auchan, non écoutée par une direction qui se plaint aujourd’hui. Même chose sur les prix, qui ne correspondent parfois plus à rien, sauf qu’ils sont en hausse. Mais qui les décide, sinon la direction ? Les ruptures ? parfois dès le premier jour de vente des produits... Mais qui commande ? Qui n’écoute pas les salariés lorsqu’ils informent que des rayons ne sont pas fournis en produits annoncés ?
Tout le monde n’y perd pas
La liste est longue et pourrait être alimentée par nos lecteurs-consommateurs (merci si vous pouvez nous adresser des exemples). Et le nouveau dirigeant d’Auchan, en ne désignant pas de responsable de cet état, veut faire passer l’idée habituelle du « tous responsables » qui justifie les mesures les plus dures contre les salariés.
En oubliant également de préciser que la perte de 250 millions n’a pas empêché les 800 membres de la famille de se goinfrer de quelque 155 millions d’euros par an. Là, le modèle social d’enrichissement n’est bizarrement pas en panne...