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À Noyelles-sous-Lens

Les salariés de Logil dénoncent une délocalisation masquée

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Mise à jour le 7 août 2024
Temps de lecture : 5 minutes

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Luttes

Pour les trente-six salariés de Logil (ex Setralog), à Noyelles-sous-Lens, la situation est insupportable. Alors qu’une procédure de liquidation judiciaire est entamée et que le tribunal ne s’était pas encore prononcé, les stocks de marchandises sont retirés et dirigés vers un autre site.

Ce mercredi 15 mai, les salarié(e)s de Logil ont appris, sans confirmation officielle, que le Tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire immédiate et sans reprise. Les lettres de licenciement devaient arriver aux alentours du 28 mai. Incrédules et désemparés, les salariés dénoncent une délocalisation masquée.

Installée à Noyelles-sous-Lens en 1990, l’entreprise Setralog qui employait alors 147 salariés, assurait la logistique du groupe France Loisirs (distribution de livres). 27 ans plus tard, en 2017, le groupe est placé en redressement judiciaire et un plan de sauvegarde de l’emploi est appliqué chez Setralog. France Loisirs est finalement liquidée en 2021 et Setralog est reprise par la Financière Trésor du Patrimoine. Après restructuration, l’effectif qui avait déjà fondu à 87 salariés n’en emploie plus que 42.

Setralog devient Logil avec seulement 38 puis 36 salariés. Le groupe (Trésor du Patrimoine) entame une procédure de liquidation judiciaire. Plusieurs jours avant la décision du juge, les salariés assistent, impuissants, au déménagement du stock de livres vers les entrepôts logistiques d’Évreux, en région parisienne. Auparavant, on leur avait demandé de démonter les chaînes automatisées, les rayonnages et l’ensemble du matériel. «  Nous sommes toujours sur place, mais nous n’avons plus d’activité, explique Marie*, une des employées. Mercredi matin, nous avons vu arriver quatre salariés d’Évreux pour embarquer les livres habituellement les plus vendus. »

En fait, une partie de l’activité avait déjà été délocalisée à Évreux, ce qui explique la forte baisse d’activité du site de Noyelles-sous-Lens. Ce dernier n’avait gardé que l’activité expédition des commandes aux clients. Avant 2020, l’entreprise traitait au total 100 000 colis par jour. Cette année, le chiffre avait chuté en dessous du millier.

Traitement inhumain

Mais ce que regrettent le plus les salariés (qui ne croyaient pas à une reprise), c’est la manière « inhumaine  » dont ils sont traités. Récemment, ils ont préparé un message qu’ils comptaient glisser dans les colis expédiés aux clients. « Nous tenons à vous informer, est-il écrit, que le groupe financier Trésor du Patrimoine, détenteur de la marque France Loisirs, a décidé de délocaliser sauvagement l’activité logistique […] basée à Noyelles-sous-Lens depuis 40 ans vers un autre site. Cela, sans payer les salaires et en laissant sur le carreau 38 salariés, ainsi que leurs familles. »

Car effectivement, la direction avait décidé de suspendre les salaires puis de ne payer que les personnes effectivement présentes dans l’entreprise. Les huit personnes actuellement en congé maladie, par exemple, n’auraient pas reçu leur paie. L’objectif était d’attendre la mise en œuvre des AGS (garantie des salaires après liquidation) avant même que le tribunal prenne une décision. Devant la menace que présentait ce message pour son image, l’entreprise a finalement changé d’avis.

Livres de coloriage en cadeau

Cela ne fait pas oublier les mauvaises conditions de travail (3 °C à 12 °C dans les ateliers durant l’hiver) forçant l’équipe à faire valoir son droit de retrait. «  À l’occasion de Noël, la direction nous a offert des livres de coloriage, sans crayon », parviennent-ils à sourire.

Avec 30 ans d’ancienneté, les salaires plafonnent à 1240 euros net. Ancien membre de l’équipe de direction de Noyelles-sous-Lens, Michelle* a choisi de démissionner l’an dernier. « Après un arrêt maladie, j’ai été démise d’une bonne partie de mes missions », explique-t-elle. En fait, j’avais bien compris que la reprise de l’entreprise par la Financière Trésor du Patrimoine ne servait qu’à racheter le fichier clients et à préparer la délocalisation de l’activité. Nous avons très vite senti le couperet quand nous avons constaté, par exemple, que des informaticiens se retrouvaient avec juste des logiciels Word et Excel pour travailler ! »

Le drame, aujourd’hui, est que l’entreprise ne compte plus de syndicats. Ce n’était pas vrai en 2021 lorsque les salariés se sont mis en grève pour sauver une partie de l’effectif.« Mais après cela, explique Michelle, la Financière Trésor du Patrimoine avait réorganisé l’entreprise en petites entités, tuant l’organisation des travailleurs. » Voilà qui, à présent, ne rend pas simple une action collective. La sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly a interpellé le préfet du Pas-de-Calais sur cette situation ubuesque.

*Les prénoms ont été modifiés.

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