Le Président du MEDEF propose lui aussi de supprimer cet abattement de 10 %. Patrick Martin juge « aberrant » et « contre-nature » l’abattement « pour frais professionnels » qui coûte 4,5 milliards d’euros par an. Cette économie permettrait de réduire le déficit du régime des retraites sans augmenter les cotisations du travail.
Une confusion entretenue
Patrick Martin, relayé par nombre de journalistes, entretien la confusion entre un abattement et une réduction, deux éléments bien différents. La déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels est réservée aux traitements et salaires des salariés.
L’abattement de 10 % sur les pensions et rentes viagères avec un minimum et un plafond a été instauré par la loi de finances pour 1978. Cet abattement de 10 % est le résultat de choix politiques opérés en fonction du système fiscal qui est déclaratif et des capacités à frauder des uns et des autres. Destiné à alléger la charge fiscale des titulaires de pensions, de retraites et de rentes viagères, il a été accordé et maintenu par souci d’équité, compte tenu du fait que seuls les retraités étaient pénalisés par les modifications successives apportées dans le cadre du calcul de l’impôt (dont les grands bénéficiaires étaient les contribuables autres que les retraités et les salariés). Cet abattement est la contrepartie du fait que les revenus des retraités avaient été et continuaient d’être déclarés par des tiers sans possibilité de fraude fiscale.
Il faut préciser que ces 10 % représentent un abattement plafonné et non pas une déduction forfaitaire pour frais. Ils ne correspondent pas à des frais professionnels, ce qui effectivement constituerait une aberration.
L’abattement fiscal est une réduction légale de la base d’imposition, c’est-à-dire de l’ensemble des revenus retenus pour calculer le montant de l’impôt. Il peut être fixe ou proportionnel. L’abattement pour les retraités est proportionnel (10 %). L’abattement et la déduction ne sont pas de même nature, d’un point de vue fiscal.
Cependant, cet abattement est souvent considéré comme une niche fiscale que certains députés tentent de remettre régulièrement en cause, en arguant qu’il s’agit de proposer des économies budgétaires (qui se feraient au détriment des retraités). Le Projet de loi de finances (PLF) et le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) sont de natures différentes, tant et si bien qu’ils sont examinés et votés séparément. Annoncer et laisser accroire que les gains réalisés par l’impôt sur le revenu réduiraient les déficits du régime des retraites est une aberration ; ils amélioreraient le budget de l’État (toujours au détriment des retraités).
Une atteinte au pouvoir d’achat des retraités
La suppression des 10 % conduirait à majorer fortement le taux d’imposition à l’impôt sur le revenu des personnes retraitées et à rendre imposables des personnes retraitées qui, au préalable, ne l’étaient pas. Qui plus est, cela touche plus fortement les personnes aux pensions modestes, car l’abattement de 10 % actuel, est plafonné à 4 321 euros pour les revenus de 2023 imposables en 2024, ce qui correspond à un revenu de 3 600 euros mensuels par foyer fiscal.
Seront particulièrement touchés les retraités qui seuls, ou à deux, perçoivent moins de 3 600 euros par mois. Les personnes retraitées continuent d’être totalement « transparentes » face à l’administration fiscale, ce qui n’est toujours pas le cas des membres du MEDEF qui participent pour beaucoup aux 100 à 150 milliards d’euros de la fraude fiscale réalisée chaque année en France. C’est là une piste pour trouver les nouvelles recettes fiscales que dit rechercher le MEDEF.