Quid, pour commencer, de l’intention présidentielle d’organiser des référendums ? Bien malin qui pourrait répondre après l’exercice de ce mardi. Comme l’a justement dit la secrétaire nationale de la CGT, Sophie Binet, nous avons eu droit à de la communication présidentielle. Cette dernière a eu beau ne pas le lâcher sur les grands dossiers sociaux, Emmanuel Macron n’a pas bougé d’un pouce. Non, a-t-il affirmé, il n’y aura pas de référendum sur l’abrogation de la réforme des retraites et le départ à 64 ans.
Fort des fiches qu’il a amenées, il maintient qu’une abrogation coûterait beaucoup trop cher (28 milliards d’euros pour une retraite à 60 ans, affirme-t-il, alors que la réforme doit permettre de dégager 17 milliards). De toute façon, il s’en remet aux conclusions du conclave convoqué par François Bayrou et que la CGT a choisi de quitter.
La syndicaliste insiste : pourquoi ne pas imposer les patrimoines de plus de 100 millions qui permettraient de faire entrer 20 milliards d’euros par an dans les caisses de l’État (taxe Zucman) ? Là encore, le chef de l’État répond que cela ferait fuir les détenteurs de ces patrimoines.
Rare ouverture : la fin de vie
Que propose-t-il alors ? Une conférence réunissant les forces patronales et syndicales sur le mode de financement de notre modèle social. Mais lui ne peut rien, surtout depuis la dissolution. Alors, il se tourne vers le gouvernement à qui il demande d’organiser cette conférence. Même chose pour la qualité du travail et l’évolution des formes du travail. Même chose quand il évoque, sans en reprendre l’expression, une TVA sociale. En clair, la balle est dans le camp du gouvernement Bayrou. Le Premier ministre aura apprécié.
Tout au plus, Emmanuel Macron maintient qu’il y aura bien des consultations référendaires, ou plutôt une seule avec plusieurs questions. Sans dire sur quels sujets (mais en en excluant certains) ni avec quelle technique. Comment répondre en effet à plusieurs questions sur des sujets différents avec un seul vote ? Seule ouverture, et encore, un référendum sur la fin de vie si le projet de loi actuel ne débouche pas et ne passe pas le Sénat. L’intervention du journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot et obligé de s’exprimer via une voix artificielle, a apparemment déstabilisé le président.
Non à la nationalisation d’ArcelorMittal
Sur la réindustrialisation et les grands dossiers économiques, c’est encore sans surprise que tombent les réponses présidentielles. Emmanuel Macron affirme que l’emploi industriel repart et évoque les gigafactories des Hauts-de-France. Mais alors que les salariés d’ArcelorMittal avaient passé la journée à Paris, devant le siège du groupe, il dit haut et clair son opposition à la nationalisation « qui ne serait pas une solution ». Affirmer le contraire serait mentir aux Français, assure-t-il en substance. Il jure en revanche que les sites sidérurgiques de Dunkerque et de Fos seront sauvés. Sans détailler le risque de disparition de la sidérurgie française et européenne, donc sans tenir compte des alertes incessantes, depuis un an, des syndicats et notamment de la CGT.
Tout au long de ces trois longues heures, il a passé beaucoup de temps à défendre son bilan. Mais que ce soit face à Sophie Binet ou face à l’ultra-libérale Agnès Verdier-Molinié (directrice du think tank Ifrap) qui l’a attaqué sur le déficit accumulé depuis son élection en 2017, il se contente de s’accrocher à ce qu’il a fait et à jurer que cela ira mieux demain.
On notera qu’il a tenté de donner des gages au maire de Béziers, Robert Ménard, sur la police municipale, la sécurité, la prison (même à l’étranger), sur l’immigration. Faire les yeux doux à un élu d’extrême droite (même si Ménard s’en défend), voilà une initiative qui dénote dans l’ensemble de l’exercice. Le principal concerné ne s’est de toute façon pas montré dupe.
Reste enfin la politique internationale. Passons sur l’Ukraine et sur les sanctions européennes promises contre Vladimir Poutine si ce dernier ne respecte pas l’ultimatum des dirigeants français, allemand, britannique et polonais. Il répète aussi le soutien de la France pour assister l’armée ukrainienne.
Concernant Gaza, et dans un contexte où le Premier ministre israélien annonce un plan de conquête et le déplacement des Gazaouis, Emmanuel Macron -interpellé par un médecin franco-algérien- refuse le terme « génocide », préférant en laisser la qualification aux historiens. Il lui préfère celui de « drame humanitaire ». Il qualifie l’attitude de Benyamin Netanyahou de « honteuse ». Mais il maintient son opposition à une arrestation de ce dernier ou de ses ministres demandée par la Cour pénale internationale. Il ne dit pas un mot de la reconnaissance par la France de l’État Palestine. Il l’avait pourtant suggérée pour la conférence internationale prévue le 2 juin aux Nations Unies avec la France et l’Arabie saoudite.