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Alexandre Rotenberg/shutterstock
Palestine

Le courage des militants israéliens anticolonialistes

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Mise à jour le 28 février 2025
Temps de lecture : 4 minutes

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Palestine Israël Guerre Paix

Alors que les informations sur la situation en Palestine véhiculées par les médias sont souvent « partielles, partiales, biaisées voire carrément fausses », la LDH juge nécessaire de mieux informer les citoyens et d’outiller ses militants au travers d’un cycle de conférences animées par des chercheurs, des spécialistes et des universitaires.

Une cinquantaine d’auditeurs étaient réunis, vendredi 14 janvier, dans le grand amphithéâtre de Sciences Po Lille, pour assister à une conférence des sociologues Karine Lamarche et Caterina Bandini organisée par la section de Lille de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et l’association Lille-Naplouse.

Karine Lamarche, chargée de recherche au CNRS, membre du Centre nantais de sociologie et Caterina Bandini, sociologue au Centre d’études et de recherches administratives, politiques et sociales (Ceraps) de l’Université de Lille sont allées en Israël rencontrer les militants anti-occupation qui militent, dans des conditions très difficiles et confrontés à l’hostilité de la société, pour la fin de la colonisation et de l’apartheid.

Des mobilisations minoritaires

D’emblée, Karine Lamarche prévient que les luttes qu’elles ont étudiées sont « des mobilisations minoritaires, marginales, qui concernent extrêmement peu de monde » dans un pays où 70 % des Israéliens soutiendraient aujourd’hui le projet de Trump de déportation des deux millions de Palestiniens de la bande de Gaza.

Il existe pourtant des associations, des collectifs et des mouvements qui se définissent comme « anti-apartheid » ou anticolonialistes. C’est le cas du Hadash (Front démocratique pour la paix et l’égalité) une alliance parlementaire de gauche radicale israélienne juive et arabe dont le Maki, le Parti communiste israélien est la principale force.

D’autres associations comme Mesarvot, Homoked ou B’Tselem fournissent conseils juridiques et plaidoyers. Des associations comme Rabbis for human rights ou The road to recovery se rendent dans les territoires palestiniens dans une démarche de « présence protectrice ». Un groupe comme Zochrot informe les Israéliens sur la Nakba en organisant des visites sur les sites des villages détruits en 1948.

La plupart de ces groupes emploient le terme d’apartheid pour qualifier le système de domination coloniale mis en place en Israël et dénoncent la « Nakba en cours ». Quelques-uns de ces groupes vont plus loin et dénoncent le sionisme « en tant que tel » comme un « colonialisme de peuplement ». Une telle position est difficilement dicible en Israël, particulièrement après le 7 octobre 2023.

Les manifestations de 2023 contre la réforme judiciaire entreprise par Netanyahou en sont un cas d’école : alors que la première manifestation, organisée par la gauche radicale anticolonialiste avait rassemblé 30 000 personnes, le mouvement a très vite été récupéré par les partis de la gauche qui se définit comme sioniste et des hauts gradés se sont succédé sur les tribunes en omettant de parler de la colonisation.

L’éléphant dans la pièce

Dans les manifestations, les militants du « Bloc contre l’occupation » se faisaient insulter et bousculer lorsqu’ils brandissaient des drapeaux palestiniens, avec une différence entre Jérusalem et Tel-Aviv : s’il était possible de défiler avec des drapeaux palestiniens et des slogans anticolonialistes à Tel-Aviv, manifester pour les droits des Palestiniens est devenu impossible à Jérusalem où les drapeaux palestiniens étaient immédiatement arrachés des mains des manifestants, brutalisés par la police.

Imaginatifs, les militants de la gauche anti-occupation arboraient sur leurs drapeaux des éléphants et des pastèques : les couleurs de la pastèque rappellent en effet celles du drapeau palestinien, écrasé par « l’éléphant dans la pièce » que l’on refuse de voir, symbole de la colonisation…

Depuis le 7 octobre, la situation est devenue intenable pour ces militants anticolonialistes israéliens qui ne peuvent plus se rendre dans les villages de Cisjordanie manifester avec les Palestiniens, qui seraient aussitôt arrêtés ou abattus par des colons d’extrême droite. En 2024, plus de 1 600 démolitions ont été menées par l’armée israélienne en Cisjordanie, 600 de plus qu’en 2023.

Si des manifestations ont lieu pour réclamer le retour des otages et dénoncer la conduite de la guerre, elles ne remettent jamais en cause le paradigme colonial.

Fatigués, soumis aux pressions de la société, à la répression, à la réprobation du cercle familial dans un pays où le service militaire est obligatoire, de nombreux militants de la gauche radicale anticolonialiste israélienne songent aujourd’hui à quitter un pays dans lequel ils ne se reconnaissent plus.

Nourri d’illustrations de terrain, l’exposé de Karine Lamarche et Caterina Bandini a passionné un auditoire ému par le courage de ces militants de la gauche israélienne. Les aider dans leur combat commence, ici, par bien nommer les réalités du drame qui se joue sous nos yeux chaque jour en Palestine.

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