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Emad El Byed/Unsplash
Bande de Gaza

La côte d’Azur rêvée par Donald Trump

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Mise à jour le 14 février 2025
Temps de lecture : 6 minutes

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Palestine Israël Guerre États-Unis Donald Trump

La récente déclaration du président américain Donald Trump, concernant la bande de Gaza dont il voudrait prendre possession pour en faire une Riviera, laisse le monde diplomatique perplexe. Bluff trumpiste ou non ? Là n’est pas la question.

À l’évidence, le président des États-Unis a surpris, sinon tout le monde, au moins l’ensemble des commentateurs qui s’exprimaient ce mercredi matin 5 janvier. Faire de la bande de Gaza une Riviera, une Côte d’Azur. La réalisation et la jouissance de ce lieu sublime ne pourrait évidemment se réaliser qu’une fois rasés les décombres et autres immeubles ou infrastructures bombardés. Et, bien évidemment, après l’éviction des habitants, c’est-à-dire les Palestiniens.

Pour Trump, qui s’est exprimé en ce sens aux côtés d’un Netanyahou ravi, cela va dans le sens de l’intérêt des Palestiniens eux-mêmes qui viennent de subir une guerre atroce et à qui ne restent aujourd’hui que des ruines encore fumantes. Mieux vaut pour eux qu’ils partent ailleurs. Le président des États-Unis serait finalement un philanthrope. La page d’Histoire qui s’écrit -peut-être ainsi-ne serait alors qu’un scénario pour un réalisateur hollywoodien.

Revenons à la réalité. D’abord, quelques semaines à peine après l’intervention militaire israélienne à Gaza, en 2023, des promoteurs avaient déjà imaginé ce que ce territoire pourrait devenir. Les dessins qu’ils avaient produits et publiés à l’époque traduisaient clairement le dessein que pouvaient imaginer les dirigeants réactionnaires et d’extrême droite d’Israël. Aujourd’hui, ces derniers sont servis par une opinion publique choquée et désorientée par l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre 2023. On ne saurait leur reprocher le traumatisme subi. La libération progressive des otages le souligne d’autant plus.

Échec de la paix

Pourtant, on ne peut s’abstenir de prendre le recul nécessaire sur la situation. Le cessez-le-feu, qui est finalement entré en vigueur, apparaît particulièrement fragile. La libération des prisonniers palestiniens, par Israël, se fait à contrecœur (il faut bien respecter les termes de la négociation) et les personnes libérées demeurent sous contrôle.

Par ailleurs, le chef du Fatah Marwan Al-Barghouti, incarcéré depuis 2002, demeure pour l’instant dans les geôles israéliennes. Sa libération ne semble pas à l’ordre du jour. Il n’est bien-sûr pas membre du Hamas, il serait le mieux placé pour prendre des responsabilités politiques dans ce conflit qui n’en finit pas, il pourrait jouer un rôle efficace et déterminant pour la paix. Mais depuis le 7 octobre, il est soumis à un régime de détention très brutal.

Le cessez-le-feu est non seulement fragile, au vu du déroulé actuel des événements. Il ressemble de plus en plus à un échec de la paix. Soutenu par une opinion publique bouleversée (avec une opposition réelle mais, hélas, réduite au silence et donc rendue inaudible), le pouvoir israélien peut plus que jamais compter sur la complicité et l’appui de Washington. Car jamais Benjamin Netanyahou, ses soutiens et, bien plus encore, ses ministres d’extrême droite, n’ont souhaité un État palestinien. Toujours, ils ont combattu une solution à deux États devenue plus que jamais une utopie. Désormais, avec le soutien de celui qui veut agir en « maître du monde », Donald Trump, ils donnent crédit à cette dystopie que serait un territoire palestinien reconstruit et remodelé pour un monde riche dépourvu du peuple palestinien.

Une nouvelle Nakba ?

C’est oublier un peu vite que les États, l’Égypte et la Jordanie, vers lesquels le duo israélo-américain voudrait « déporter » les habitants de la bande de Gaza, ne sont pas d’accord. C’est faire peu de cas, aussi, de l’avis des instances internationales qui désapprouvent une telle option. C’est oublier l’attachement des Palestiniens à leur terre (ils l’ont montré dès le cessez-le-feu en retournant chez eux), c’est oublier et même nier le droit des peuples à l’autodétermination et au droit de disposer de leur existence.

Ni Trump, ni Netanyahou n’en ont cure. Ils ne sont pas -encore- seuls. Reste que le pouvoir israélien n’en a pas fini avec la guerre. Il le promet. Reste qu’il poursuit sa politique de colonisation, d’expulsion et de nettoyage ethnique. Comment la communauté internationale compte-t-elle, enfin, réagir ?

Ce qu’il se passe dans cette partie du monde est effroyable. Un nouveau chapitre de la Nakba (l’exode palestinien forcé en 1948) est en train de s’écrire. Le peuple palestinien est seul face à une occupation de ses territoires et face à un nettoyage ethnique. Les opérations israéliennes en Cisjordanie n’ont de cesse de démontrer cette triste réalité. Rien, depuis des décennies, depuis au moins 1967, n’a été fait pour parvenir à une véritable paix et à une reconnaissance de l’État de Palestine, rien n’a été fait pour la réalisation d’un territoire à deux États. La communauté internationale regarde passer la caravane hideuse et destructrice. Elle n’aboie même plus.

Dans un monde idéal, il faut discuter et signer des accords. Mais un monde qui vit, dans sa chair, la dépossession, la continuité de la colonisation et, pour finir, tout ce qui ressemble très clairement à un génocide puis à un exode, ce monde-là n’est pas un monde idéal. Soixante-dix-sept ans après la Nakba, après la « catastrophe », la parole politique et la diplomatie ont échoué. Sur les berges, reste la souffrance d’un peuple : la Palestine. Pourtant, c’est aux Palestiniens que l’on demande de faire preuve de modération. Mais qui, dans une injustice et une souffrance absolue subies de génération en génération, ne serait tenté par une radicalisation ? Le peuple palestinien a droit à l’autodétermination. Il a droit à un État qui soit reconnu par les autres États dans le monde. Ce monde n’est pas celui de Benjamin Netanyahou. Il n’est pas celui de Donald Trump.

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