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Avec le jusqu'au-boutisme de son gouvernement

Israël en voie de devenir un pays paria

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Mise à jour le 6 juin 2025
Temps de lecture : 7 minutes

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Palestine Israël

Après 19 mois d’une guerre impitoyable, qui dépasse amplement les représailles après les attentats du Hamas du 7 octobre 2023, Israël intensifie encore ses frappes et a annoncé un nouveau plan de conquête de Gaza. Si la mise en cause du jusqu’au-boutisme israélien contre les Palestiniens traîne encore les pieds, le regard sur l’action de Netanyahou, de Smotrich et de leurs alliés d’extrême droite est en train de changer sérieusement.

Ces derniers jours, les frappes israéliennes se montrent de plus en plus atroces. Chaque matin apporte son lot de civils tués. Le ciblage d’un médecin et le massacre de neuf enfants (brûlés au point que leur famille ne peut les identifier) est un des épisodes récents qui ont le plus marqué les esprits et l’opinion internationale.

Venu à Roubaix à l’invitation de l’AFPS, vendredi soir 23 mai, l’ex-président de Médecins sans frontières (MSF) Rony Brauman n’a pas mâché ses mots. « Israël est un État paria », a-t-il dit devant un public de plus de 200 personnes. Il n’a fait en cela qu’emboîter le pas à Yaïr Golan, le chef de file de l’opposition de gauche israélienne et ancien chef d’état-major adjoint. Quelques jours plus tôt, le 20 mai, celui qui s’était illustré le 7 octobre 2023 en venant au secours de victimes des attaques du Hamas avait précisément déclaré, au micro d’une radio publique : « Israël est en train de devenir un État paria, comme l’Afrique du Sud par le passé ».

Juif, de gauche sioniste, soldat israélien et… antisémite

Depuis, lui qui est toujours réserviste de l’armée israélienne est mis au ban de la scène par Netanyahou lui-même qui le traite d’antisémite. Un pas est franchi dans la folie du Premier ministre, soumis à son extrême droite, qui considère que tout ce qui s’oppose à son action relève de l’antisémitisme. On peut donc être juif, réserviste de l’armée israélienne, représentant de la gauche sioniste et être antisémite.

En France, aux États-Unis et ailleurs, ceux qui manifestent leur soutien au peuple palestinien et qui sont réprimés s’en sentiront sans doute réconfortés. Avec un bilan provisoire et très lourd de plus de 52 000 morts dont plus de 15 000 enfants, la vérité sur les véritables intentions du pouvoir israélien semble enfin sortir. Yaïr Golan n’avait d’ailleurs pas dit que cela. Avant de prononcer le mot « paria » qui fait aujourd’hui peur aux Israéliens dans leur ensemble, il avait déclaré : «  Un pays sain ne fait pas la guerre à des civils, n’a pas pour hobby de tuer des bébés et ne se fixe pas pour objectif d’expulser des populations. »

Ce changement de ton, ou de vision sur ce qu’il se passe réellement à Gaza, s’accompagne d’un enhardissement sémantique chez tous ceux qui réclament un cessez-le-feu immédiat, la paix, l’arrêt de la colonisation et la reconnaissance de l’État de Palestine. Ainsi, le mot accusateur « génocide » est-il de plus en plus entendu. Dans un entretien qu’il a accordé à l’Humanité le 23 mai, le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel le dit très clairement : « Il s’agit d’un génocide : les intentions sont clairement affichées par les responsables du gouvernement israélien qui prônent l’anéantissement et l’effacement du peuple palestinien et l’extension de la colonisation. »

Les hésitations européennes

Le président de Médecins du Monde, Jean-François Corty, ne dit pas autre chose : « On a tous les éléments techniques pour dire qu’un génocide est en cours à Gaza. Nos équipes sur le terrain (une centaine de représentants de Médecins du Monde) corroborent tout un faisceau d’arguments : les meurtres en masse, l’aide humanitaire empêchée, les conditions de vie physiques et mentales indignes. Ce sont trois des cinq piliers qui permettent de définir le crime de génocide. À part les Américains qui ne doutent de rien, on voit Macron, les Anglais, les Allemands condamner mais rester dans le discours. L’Europe a annoncé un nouveau train de sanctions contre la Russie mais hésite pour Israël. » Dans un entretien à La Voix du Nord, ce 26 mai, il se demande même si le droit humanitaire international n’est pas mort à Gaza.

Reste que, comme le rappelle le psychanalyste Dominique Jacques Roth, « seuls six pays européens dont l’Espagne, l’Irlande et la Norvège, ont dénoncé le nouveau plan de conquête de Gaza, rejetant ’’fermement tout changement démographique ou territorial susceptible de constituer une violation du droit international’’ ».

À Roubaix, l’autre jour, Rony Brauman s’est aussi attardé sur la famine organisée, la destruction des infrastructures donnant l’accès à l’eau ou à l’électricité, la destruction des habitations, des hôpitaux, des écoles, etc. « Gaza est un champ de ruines. » Rappelant qu’avant le blocus, Gaza était en mesure de se nourrir correctement, il est revenu sur cette famine organisée et sur la distribution très encadrée et très limitée de l’aide humanitaire par Israël. « On attire les gens en leur distribuant des restes de nourriture afin de mieux organiser leur expulsion du territoire » accuse-t-il.

Logique coloniale et apartheid

Mais pour lui, la situation actuelle résulte d’une logique ancienne (et non seulement de l’attaque du Hamas du 7 octobre). Il estime que c’est le fait colonial qui explique pourquoi on en est là aujourd’hui. « Le phénomène colonial mène à considérer l’autochtone comme un humain inférieur et menaçant. Il faut le neutraliser en l’enfermant ou en le supprimant. Or, ce que l’on appelait des implantations sont des colonies et elles sont une des caractéristiques les plus originales du sionisme. Par un curieux retournement des choses, le colon devient le véritable indigène et l’autochtone est relégué au rang de squatteur ».

C’est également ainsi, développe en substance Rony Brauman, qu’Israël est devenu un pays d’apartheid. À l’époque de l’apartheid en Afrique du Sud et de la révolte de Soweto, Shimon Peres était chargé des questions d’armement. Il avait été un des artisans de l’armement sud africain et avait alors adressé une lettre au Premier ministre de ce pays dans laquelle, après les termes formels d’un partenariat commercial, il ajoutait : « Nous avons des systèmes politiques voisins et une convergence idéologique très forte. » Shimon Peres parlait de l’apartheid comme d’un système enviable.

Il est temps, aujourd’hui, de mettre un terme au génocide et de dire, comme ce lundi 26 mai au Trocadéro, à l’appel du PCF : « Stop aux massacres, la paix maintenant, reconnaissance de l’État de Palestine ». C’est aussi dans ce sens et pour la coexistence de deux États que, le 4 juin place du Colonel Fabien à Paris, le Parti communiste organise une conférence avec des représentants de l’OLP. Mais il est aussi grand temps, rappelle Fabien Roussel, que la France réagisse avec force. Par exemple en rappelant son ambassadeur et en cessant toutes relations commerciales avec Israël.

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