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Mirza Dian Rifaldi/shutterstock
Union européenne – Ukraine

Œufs ukrainiens en Europe, la concurrence déloyale ?

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Ukraine Russie Agriculture Commerce Guerre Union européenne

Depuis 2022, l’Ukraine inonde le marché européen d’œufs et d’ovoproduits à bas prix, profitant d’un accès sans quotas ni droits de douane. Une aubaine pour les industriels, mais un casse-tête pour les éleveurs européens, qui dénoncent des pratiques déloyales.

Malgré des mesures de protection, la tension monte entre Bruxelles et Kiev.

Une invasion d’œufs à bas coût

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’UE a acheté 7 fois plus d’œufs coquille et d’ovoproduits (poudres, liquides pasteurisés) à l’Ukraine en 2023 par rapport à 2021, devenant le troisième fournisseur du marché. Un bond de 84% par rapport à 2022 est relevé, selon les données de la Commission européenne. Cette progression fulgurante s’explique par la levée des barrières commerciales décidée après l’intervention militaire russe. Objectif affiché : soutenir l’économie ukrainienne.

Mais cette ouverture a ouvert la boîte de Pandore. Les coûts de production ukrainiens, jusqu’à 48 % inférieurs à ceux de l’UE, permettent aux exportateurs de proposer des prix imbattables. Une douzaine d’œufs ukrainiens se vend ainsi à 1,20 € contre 1,70 € en moyenne pour un produit européen. « Leurs normes sanitaires et environnementales sont moins exigeantes, et la main-d’œuvre est sous-payée », dénonce Jean-Marc Chapuis, éleveur français et porte-parole de la Fédération avicole européenne.

Les industriels de l’agroalimentaire, eux, y trouvent leur compte. Les ovoproduits ukrainiens, utilisés dans les plats préparés ou les pâtisseries, réduisent leurs coûts. « C’est une question de survie face à l’inflation », justifie un cadre d’un géant de la restauration rapide sous couvert d’anonymat.

Une clause de sauvegarde trop fragile

Face à la grogne des éleveurs, l’UE a instauré en juin 2023 une clause de sauvegarde : les importations d’œufs ukrainiens sont plafonnées à 50 000 tonnes par trimestre, avec des droits de douane au-delà. Problème : ces quotas restent bien supérieurs aux volumes historiques. Résultat, les importations ont continué d’augmenter, dépassant parfois les limites autorisées.

En cause, des failles juridiques et une surveillance lacunaire. « Les œufs sont parfois déclarés comme "produits transformés" pour contourner les restrictions », explique Maria Sokolova, experte en commerce international. La guerre complique aussi les contrôles : les douaniers ukrainiens, surchargés, peinent à certifier l’origine des produits.

Les conséquences sont lourdes pour l’Europe. En Pologne, premier producteur d’œufs de l’UE, les prix ont chuté de 22 % en un an. En France, 15 % des élevages sont menacés de fermeture. « On nous demande de respecter le bien-être animal ou la traçabilité, mais ces règles ne s’appliquent pas aux importations. C’est un double standard », s’indigne Clara Dupont, éleveuse en Bretagne.

Que sont les ovoproduits ?

Transformés en poudres, liquides ou congelés, les ovoproduits représentent 60 % des exportations ukrainiennes vers l’UE. Invisibles pour les consommateurs, ils sont utilisés dans l’industrie agroalimentaire (biscuits, mayonnaises, etc.). Leur avantage  ? Un coût jusqu’à 50 % moins élevé que les ovoproduits européens.

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