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Joshua Sukoff/shutterstock
Accord transatlantique

Londres à genoux, le prix d’un accord toxique avec Washington

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Mise à jour le 10 juin 2025
Temps de lecture : 4 minutes

Mots -clé

États-Unis Union européenne Royaume-Uni Guerre commerciale

Pour éviter un isolement commercial, le Royaume-Uni a conclu avec les États-Unis un accord douanier largement déséquilibré. Cet épisode symbolise la perte d’autonomie de Londres. Mais au-delà du cas britannique, une question plus inquiétante se pose : l’Union européenne, pourtant plus puissante, risque-t-elle d’imiter ce dangereux précédent ?

L’accord signé entre Londres et Washington sur les droits de douane cristallise les contradictions de la stratégie post-Brexit britannique. Sous couvert de coopération, il entérine en réalité une série de concessions lourdes : droits de douane maintenus à 10 % sur les biens britanniques, quotas défavorables sur les voitures, zéro avantage sur les services, importations agricoles américaines contre adaptation des normes… et un achat obligatoire de 10 milliards de dollars d’avions Boeing.

Un accord humiliant pour sauver les apparences

Le Royaume-Uni, en mal d’alternatives et sous pression économique, a accepté de se mettre à genoux face à un allié plus puissant. Le deal consacre une dépendance ahurissante vis-à-vis des États-Unis. L’image est brutale : Londres s’est tirée une balle dans le pied, dans l’espoir d’éviter l’isolement complet. En réalité, c’est une stratégie de survie qui ressemble à une reddition.

Mais ce n’est pas tant le Brexit en soi qui est en cause ici, que le manque d’une stratégie alternative solide, fondée sur la diversification des alliances (Commonwealth, Asie, Afrique, Europe non-UE). En réduisant son autonomie industrielle et commerciale à un seul axe transatlantique, le Royaume-Uni s’est fragilisé.

L’UE suivra-t-elle le mauvais exemple ?

Face à ce constat, on pourrait croire que l’Union européenne, forte de son poids économique, ne se laissera pas piéger. Et pourtant : les 25 % de droits de douane additionnels américains sur les voitures européennes sont toujours en place. Washington n’a pas bougé. L’UE reste muette. Et certaines voix, comme celle de Bernard Arnault (LVMH), appellent désormais à un accord similaire, au nom de la compétitivité.

Il y a là une contradiction majeure : l’UE dispose d’un levier de négociation bien supérieur, mais pourrait céder aux sirènes de l’accès au marché américain, quitte à rogner sur ses normes et sa souveraineté. Ce serait un précédent grave.

L’erreur du Royaume-Uni n’est pas d’avoir cherché un accord, mais d’avoir accepté un deal structurellement défavorable, en position de faiblesse. L’UE ne doit pas répéter cette faute. Le poids économique ne suffit pas : encore faut-il savoir s’en servir. À cet égard, le chemin pris par la Chine, qui cherche à résister malgré les pressions et propose un rapprochement stratégique avec l’Europe, offre une alternative. Si Bruxelles veut éviter de se mettre à genoux, elle ferait bien de saisir cette perche tendue.

Le détail du deal UK-USA

  • 10 % de droits de douane sur les biens britanniques (alors qu’il n’y avait pas de déséquilibre commercial majeur)
  • Zéro taxe sur les exportations américaines vers le Royaume-Uni
  • Quotas de 100 000 véhicules britanniques à 10 %, puis 27,5 %
  • Aucun progrès sur les services, qui représentent 75 % du PIB britannique
  • Importations massives de produits agricoles américains : adaptation des normes sanitaires
  • Achat imposé de 10 Mds $ de Boeing, en échange de zéro taxe sur les moteurs Rolls-Royce

L’Europe face au dilemme

  • L’UE pèse plus de 15 fois le PIB britannique
  • Les mêmes taxes américaines sur les voitures restent en vigueur depuis Trump
  • Bruxelles reste discrète, les négociations stagnent
  • Des géants industriels (ex. LVMH) suggèrent un « deal à la britannique » pour fluidifier les exportations
  • Risque d’un alignement sur les normes américaines, perte de souveraineté réglementaire
  • Alternative  : développer une stratégie d’égal à égal ou chercher des alliances économiques Sud-Sud
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