Une transformation silencieuse qui redessine les équilibres de la finance mondiale.
Pékin tisse son réseau financier parallèle
Un des outils clés de cette stratégie est l’utilisation du dollar de Hong Kong, une monnaie ancrée au dollar américain, mais qui échappe au contrôle direct des États-Unis. En concentrant les échanges via Hong Kong, Pékin recycle les flux en dollars tout en minimisant l’influence du système bancaire américain.
De nombreuses transactions internationales, notamment avec les pays producteurs de matières premières, s’effectuent ainsi en dollars de Hong Kong. Cela permet aussi à la Chine d’éviter d’éventuelles sanctions ou restrictions financières imposées par Washington.
En parallèle de cette stratégie monétaire, la Chine accumule massivement de l’or pour consolider son indépendance financière et s’offrir une alternative au dollar comme valeur refuge. Pékin sait que toute crise majeure de confiance envers le billet vert pourrait provoquer des turbulences sur les marchés financiers internationaux. En maintenant d’importantes réserves d’or, elle sécurise sa capacité à faire face à ces crises et limite sa vulnérabilité aux décisions de la Réserve fédérale américaine.
L’accumulation d’or sert également à renforcer la crédibilité du yuan sur la scène internationale. L’objectif à long terme de la Chine est d’imposer progressivement le yuan comme une monnaie d’échange et de réserve crédible, soutenue par un stock croissant d’or qui rassure les investisseurs et les partenaires commerciaux. De nombreux pays émergents, notamment en Asie et en Afrique, commencent à diversifier leurs réserves en achetant davantage d’or au détriment du dollar américain.
Un modèle qui redessine l’économie mondiale
Entre 2010 et 2023, la Chine a multiplié par quatre ses réserves officielles d’or, atteignant plus de 2 235 tonnes. Cette accumulation ne se limite pas aux réserves de la Banque Populaire de Chine, elle inclut également les importations d’or par des banques commerciales et des investisseurs privés chinois. Par ailleurs, Pékin a développé son propre marché de cotation de l’or à Shanghai, lui permettant d’exercer une influence directe sur la fixation des prix de ce métal stratégique et de réduire davantage sa dépendance aux marchés de Londres et New York, traditionnellement dominés par les institutions occidentales.
Grâce à ces manœuvres, Pékin construit un réseau financier alternatif qui réduit progressivement l’influence occidentale tout en consolidant sa propre puissance monétaire. Plutôt que d’affronter frontalement les institutions établies, elle façonne un nouvel ordre monétaire mondial où le yuan, l’or et le dollar de Hong Kong jouent un rôle central. Cette évolution modifie en profondeur les rapports de force économiques et pose la question de la réaction des États-Unis face à cette transformation silencieuse, mais radicale.
Le dollar de Hong Kong (HKD) est lié au dollar américain par un régime de change fixe, mais il est géré par les autorités monétaires de Hong Kong sous l’influence de Pékin. Grâce à cette spécificité, la Chine parvient à gérer une partie des flux de dollars internationaux sans passer par les grandes banques américaines et sans dépendre des régulations financières imposées par Washington.
- Échanges pétroliers avec le Moyen-Orient : La Chine achète une partie de son pétrole en dollars de Hong Kong, notamment auprès de l’Arabie Saoudite, ce qui lui permet d’éviter de passer par les circuits financiers américains et de minimiser l’impact des sanctions.
- Investissements en Asie du Sud-Est : Pékin finance de nombreux projets d’infrastructures dans des pays comme l’Indonésie et la Malaisie en utilisant le dollar de Hong Kong, assurant ainsi une fluidité des transactions tout en contournant les restrictions du dollar américain.