Mais entre souveraineté nationale et ambitions multipolaires, la route semble semée d’embûches.
Un modèle de coopération pragmatique en question
Depuis leur création, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont toujours privilégié une coopération interétatique souple. Cette alliance repose sur un principe fondamental : chaque membre conserve sa souveraineté sans déléguer de pouvoirs à une structure supranationale. Contrairement à des organisations comme l’Union européenne où des institutions centralisées jouent un rôle majeur, les BRICS se concentrent sur des projets concrets dans les domaines économique, commercial et financier.
Cette approche vise à préserver l’équilibre entre des nations aussi différentes. Les BRICS rejettent ainsi l’idée de créer des institutions supranationales pouvant empiéter sur leur souveraineté. Cependant, la proposition récente d’un Parlement soulève la question d’une éventuelle transformation de cette coopération pragmatique en une structure plus institutionnalisée.
Les partisans de ce projet, dont Vladimir Poutine, y voient une opportunité. Un Parlement permettrait de structurer la prise de décisions, de renforcer la cohérence des positions sur la scène internationale et d’affirmer une alternative crédible face à des institutions jugées biaisées comme l’ONU. Mais cette idée suscite aussi des réticences parmi les membres, attachés à leur autonomie et soucieux de rendre à l’ONU son rôle initiale.
Un défi d’harmonisation entre des États hétérogènes
La diversité des BRICS constitue un atout, mais aussi un défi. Ces pays, qui regroupent près de 40 % de la population mondiale, affichent des systèmes politiques, économiques et juridiques très différents. La Chine, par exemple, est une puissance centralisée, tandis que l’Inde est une démocratie complexe et parfois chaotique. Le Brésil, quant à lui, oscille entre stabilité et crises institutionnelles.
Un Parlement commun nécessiterait donc une harmonisation délicate des procédures et des objectifs. Cette institution devrait définir clairement ses compétences pour éviter des conflits avec les institutions nationales ou internationales. « Les BRICS sont une alliance hétérogène, et cela complique la mise en place d’un organe centralisé », notent les analystes.
L’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) pourrait servir de modèle. Bien qu’institutionnalisée, cette organisation parvient à respecter la souveraineté de ses membres tout en facilitant la coordination régionale. Cependant, l’OCS s’appuie sur des objectifs régionaux limités, tandis que les BRICS cherchent à peser globalement, un défi bien plus ambitieux.
En juillet 2024, le forum parlementaire des BRICS à Saint-Pétersbourg a marqué une première étape vers un dialogue interparlementaire structuré. Un mémorandum a été signé pour intensifier les échanges de vues et de meilleures pratiques entre les législateurs des pays membres. Ce type d’initiative pourrait servir de base à la création d’un Parlement.