Ces trente dernières années, des politiques de libéralisation, sous injonction du FMI, ont contribué à la déstabilisation d’un pays qui doit chaque année relever le défi de sa sécurité alimentaire.
L’Égypte est le premier importateur mondial de blé. Le pays doit nourrir 83 millions d’habitants avec seulement 2,60 % de surface cultivable sur un territoire de 1,2 km² contre 50 % de surface cultivable pour 0,5 km² en France. Il en est de même pour l’eau, où les ressources se limitent à 54 milliards de m³ pour 170 milliards en France.
Dès lors, les défis en la matière sont immenses. Le Caire suit deux plans pour assurer la couverture de ses immenses besoins annuels en blé. Le premier vise à collecter localement la plus grande quantité possible de blé auprès des agriculteurs.
Ainsi, le taux d’autosuffisance est passé de 21 % en 1986 à 50 % à l’heure actuelle. Le second consiste à diversifier ses sources d’importations en provenance de pays tels que le Brésil, l’Inde ou la Russie.
L’Égypte, future plaque tournante vers l’Afrique
Au fil des années, la Russie est devenue un acteur majeur dans l’exportation de blé vers l’Égypte. Moscou ne cache pas son ambition de faire de son nouveau partenaire des BRICS+ une plaque tournante pour la distribution du blé en Afrique.
Le blé, bien nommé “l’or jaune”, oblige le gouvernement égyptien à agrandir et à moderniser ses silos qui peuvent désormais maintenir le blé en bon état pendant 18 mois. Pour un pays comme l’Égypte, il s’agit d’échapper à la voracité des multinationales, d’augmenter ses capacités de stockages.
Autre priorité : les délais de transport. Un facteur déterminant dans le prix des céréales ; pour la Russie, une dizaine de jours suffit dans l’approvisionnement de blé, lorsque pour les USA cela en nécessite 25.
Les BRICS+ sont rapidement devenus une opportunité pour l’Égypte, à fortiori depuis l’annonce de la création d’une bourse céréalière nouvelle.
L’ère pharaonique, c’est le début de l’histoire du blé à l’époque où l’Égypte était nommée « le silo du monde ». Le blé des pharaons, blé d’Osiris, blé à septuples têtes, autant de noms utilisés pour désigner le blé égyptien, communément appelé Kamut.
Il était caractérisé par ses qualités nutritionnelles supérieures et sa grande productivité. L’Égypte apparaît dans le Coran comme lieu des « trésors de la terre » à l’époque du prophète Youssef.
Ensuite, l’Égypte a servi de « grenier à Blé » de l’Empire romain pendant toute la période de son occupation qui a duré 600 ans. Bien plus tard, pour couvrir les besoins des forces britanniques sur son sol, l’Égypte a commencé à importer du blé vers 1951. Après la révolution de 1952, la consommation de blé a pris une pente ascendante lorsque le gouvernement a décidé de subventionner le pain de blé.
Depuis, les importations de blé ont suivi la courbe démographique qui est passée de 27 millions d’habitants en 1962 à 83 millions en 2023. En 1984, l’Égypte prend la place du Japon et devient le 1ᵉʳ importateur mondial de blé. Avec 1,5 million de naissances par an, l’Égypte devrait s’approvisionner d’environ 300.000 t de blé supplémentaires chaque année pour nourrir sa population. L’obsession de l’Égypte à veiller au prix et sécuriser ses approvisionnements en Blé est donc parfaitement justifiée.