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Inde

Comment l’État socialiste du Kerala a vaincu l’extrême pauvreté

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Mise à jour le 10 juin 2025
Temps de lecture : 4 minutes

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Inde

Avec ses 35 millions d’habitants, le Kerala deviendra en novembre prochain le premier État indien à éradiquer complètement l’extrême pauvreté. Dirigé depuis des décennies par les communistes, ce territoire du sud-ouest de l’Inde démontre qu’une autre voie est possible, combinant planification rigoureuse, décentralisation du pouvoir et investissements massifs dans les services publics.

Comprendre le fédéralisme indien

L’Inde est une fédération de 28 États, chacun doté d’un gouvernement autonome et de larges compétences en matière d’éducation, de santé ou d’aménagement. Mais tous ne disposent pas de la même marge de manœuvre politique. Le Kerala se distingue par une longue tradition de gouvernements de gauche, souvent dirigés par le Parti communiste d’Inde (marxiste), qui a su utiliser les leviers de l’autonomie locale pour mener des politiques sociales ambitieuses.

En 2021, le gouvernement du Left Democratic Front (LDF) lançait le Programme d’éradication de l’extrême pauvreté (EPEP) avec un objectif ambitieux : sortir de la misère absolue toutes les familles identifiées d’ici à 2026. Les résultats dépassent toutes les attentes.

Un programme sur mesure pour 64 000 familles

Grâce à un recensement minutieux, 64 002 familles – environ 100 000 personnes – ont été identifiées comme vivant dans des conditions indignes. Pour chacune d’elles, un plan personnalisé fut établi, combinant accès au logement, soins médicaux, formation professionnelle et création de revenus stables.

« La responsabilité première du gouvernement est d’améliorer la qualité de vie de la population », insiste Pinarayi Vijayan, le ministre en chef communiste. Cette philosophie se traduit par des résultats concrets : dès 2025, plus de 70 % des familles ciblées ont retrouvé une situation digne. La circonscription de Dharmadam, fief politique de Vijayan, a été la première déclarée « libérée de la misère », tandis que le district d’Ernakulam vise cet objectif pour le 15 août 2025.

La puissance de la décentralisation

Ce succès ne doit rien au hasard. Il s’appuie sur des décennies de politiques sociales audacieuses initiées par les gouvernements communistes successifs. Dès les années 1960-70, le Kerala se distingue par une réforme agraire radicale redistribuant les terres aux paysans pauvres. L’État investit massivement dans l’éducation gratuite et la santé publique, portant son taux d’alphabétisation à 94 %, contre 74 % au niveau national.

Mais la véritable innovation réside dans la décentralisation du pouvoir. Les Gram Panchayats, ces conseils locaux ancrés dans chaque village, ont joué un rôle clé dans la mise en œuvre de l’EPEP. Ils ont permis d’adapter les solutions aux réalités locales et de garantir un suivi personnalisé des familles.

Le programme Rights Without Delay illustre cette approche : en fournissant des papiers d’identité à plus de 21 000 familles exclues des systèmes administratifs, il leur a ouvert l’accès aux aides sociales. « Les communistes ont toujours cru en la décentralisation. C’est ce qui permet des solutions réellement adaptées aux besoins des gens », explique un cadre du Parti communiste d’Inde (marxiste).

Cette expérience kéralaise démontre qu’avec une volonté politique claire, des institutions locales fortes et des investissements sociaux conséquents, l’éradication de la pauvreté est possible. Alors que le reste de l’Inde mise sur la croissance économique comme seul remède, le Kerala offre une alternative concrète et vérifiable.

Kerala vs Inde – Le choc des chiffres

Alors que l’Inde affiche encore un taux de pauvreté multidimensionnelle de 14,96 %, le Kerala est descendu à 0,71 %. L’espérance de vie y atteint 75 ans contre 69 ans en moyenne nationale, et les dépenses sociales représentent 8,5 % du PIB contre 5,3 % pour l’ensemble du pays.

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