Équipements mécaniques et électriques, produits pharmaceutiques, matériels de transports et autres produits divers et variés ; la liste des biens exportés par la France vers l’Algérie est importante. Paris est, d’après le FMI, le deuxième fournisseur d’Alger et le troisième client. De l’autre côté, l’Algérie exporte beaucoup d’hydrocarbures (pétrole et gaz naturel) vers la France. Si la balance commerciale entre les deux pays est souvent en faveur de Paris, l’Algérie réduit depuis des années sa dépendance aux importations françaises en diversifiant ses partenaires commerciaux, notamment avec la Chine, la Turquie ou, plus récemment, la Russie.
La diversification des approvisionnements est aussi posée à la France, puisqu’une réduction des importations d’hydrocarbures algériens augmenterait immédiatement les coûts énergétiques et ferait perdre un marché important aux entreprises françaises.
Blé et automobile, deux exemples de la crise
Pour le moment, les échanges commerciaux entre les deux pays ne semblent pas souffrir plus que ça de la brouille diplomatique. Mais dans quelques secteurs, comme le blé, l’Algérie a engagé de longue date une diversification de ses approvisionnements. C’est d’ailleurs dans cette logique qu’en octobre 2024, l’Algérie a rejoint les BRICS en tant que membre partenaire, aux côtés de douze autres pays. En parallèle, la Russie, suite aux sanctions de 2014, est devenue l’un des premiers exportateurs mondiaux de blé, grâce à des récoltes exceptionnelles et des prix bon marché, ce qui a permis à l’Algérie de sécuriser ses approvisionnements par la Mer noir.
À l’automne 2024, lorsque l’Algérie a rappelé son ambassadeur à Paris, elle a exclu les entreprises françaises de certains appels d’offres pour l’importation de blé. L’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a démenti avoir écarté les entreprises françaises pour des raisons politiques, rappelant que l’importation de blé est uniquement soumise à des critères techniques. La tension est palpable.
L’industrie automobile en est un autre exemple. Deux usines majeures, l’une Stellantis et l’autre Renault, devraient tourner à pleine capacité dans la région d’Oran. Mais les projets patinent. Renault se trouve confronté à de nouvelles réglementations prises par le pouvoir algérien, qui imposent l’intégration de 30 % de pièces fabriquées en Algérie dans les voitures sortant d’usine. Problème : des pièces sont bloquées au port par les autorités algériennes depuis 2020. L’usine est à l’arrêt. Au total, seulement 2 456 véhicules sont sortis de l’usine en 2023, sur une capacité d’environ 60 000. Le groupe au losange poursuit ses discussions avec le ministère de l’Industrie local.
« Plus rien n’avance, si ce n’est les relations commerciales »
Il faut tenir compte de ces exemples précis pour comprendre le risque que ferait peser une crise commerciale. En observant simplement les relations bilatérales entre les deux pays, il n’y a pas péril en la demeure. Personne n’aurait intérêt à une telle crise.
L’Algérie reste le deuxième débouché des exportations françaises sur le continent africain et, selon les dernières données fournies par les Douanes, il n’y a pas de recul massif du commerce bilatéral entre les deux pays en 2024. Toutefois, les exportations de l’Algérie vers la France ont baissé de 12 % et, dans le même temps, les importations françaises de gaz naturel liquéfié algérien ont reculé. En parallèle, les exportations françaises vers l’Algérie ont augmenté. De telles fluctuations n’ont rien d’inquiétant, à condition que ça ne soit pas poussé de manière structurelle.
D’ailleurs, le Président algérien Abdelmadjid Tebboune ne s’y trompe pas en déclarant dans l’Opinion qu’entre la France et l’Algérie, « plus rien n’avance, si ce n’est les relations commerciales ».
Les tensions sont larvées, mais existent bel et bien. Pour le moment, personne n’y est gagnant, c’est le moins que l’on puisse dire.