Donald Trump, non content de faire trembler le monde en arrivant à la Maison blanche, semble décomplexer les dirigeants les plus réactionnaires de la planète. En témoigne le discours fleuve de Javier Milei le jeudi 23 janvier au forum économique mondial de Davos, lors duquel il avait troqué son costume habituel de pourfendeur de l’inflation et du déficit public contre une armure de soldat idéologique.
Se disant désormais accompagné de « camarades dans [la] lutte pour les idées de la liberté aux quatre coins de la planète », il citait alors avec fierté les noms de ses alliés : « la féroce dame italienne », sa « chère amie » Giorgia Meloni, Viktor Orbán, Nayib Bukele, Benyamin Netanyahou et enfin Donald Trump. Une véritable internationale réactionnaire en guerre contre ce qu’il appelle le « wokisme maladif ». S’ensuivirent plusieurs saillies contre les personnes trans, les féministes et les homosexuels. Il avait alors qualifié la lutte pour le droit à l’avortement d’ « agenda sanguinaire et meurtrier », remis en cause la légitimité du terme « féminicide », prétextant que celui-ci impliquait une discrimination en donnant plus de valeur à la vie d’une femme qu’à la vie d’un homme, avant de qualifier les homosexuels de « pédophiles ».
La rue contre le fascisme
Ces propos ont provoqué une vague d’indignation dans toute l’Argentine, aboutissant à une mobilisation de grande ampleur le 1ᵉʳ février. À Buenos Aires et dans plusieurs autres grandes villes, des centaines de milliers de personnes ont répondu à l’appel d’une gigantesque marche de la « fierté antifasciste ». Un moment de rassemblement unitaire marqué par la présence des syndicats et partis politiques de gauche péroniste tels la CGT, mais aussi du parti centriste Union civique radicale (UCR).
Face à une telle démonstration de force, Javier Milei s’était d’abord fébrilement défendu en affirmant que ses propos avaient été déformés et que les manifestants qui défilaient dans les rues de la capitale avaient été manipulés par les partis, dénonçant « une marche woke dont le motif a été inventé ». Mais ce mercredi 5 février, le président d’extrême droite a surenchéri en annonçant par un communiqué officiel une série de mesures choc dont la plus significative est l’interdiction des « traitements et opérations chirurgicales pour un changement de genre concernant des mineurs ».
Quid des forces syndicales et politiques ?
Pour l’heure, nul ne sait quelle sera la réaction des forces syndicales et politiques du pays, engagées depuis plus d’un an dans un véritable bras de fer face à l’exécutif. Mais certaines organisations ont déjà marqué leur volonté de contester cette décision, à l’image de la Fédération argentine LBGT+ qui a déclaré sur le réseau social X : « Le président ne peut pas modifier une loi par décret. Et s’il essaie, nous ferons appel à la justice et à la Cour interaméricaine [des droits de l’homme] si nécessaire ».
Un rapport de force est donc installé entre Milei et ses adversaires qui pourrait bien se révéler décisif pour la suite de son mandat.