Cet écrivain franco-algérien, ardent défenseur de la République, propose une réflexion saisissante sur les défis posés par cette idéologie, qu’il qualifie de totalitaire, et sur les faiblesses des démocraties face à ce danger.
La laïcité, un principe à défendre coûte que coûte
Au cœur de l’ouvrage se trouve une défense vibrante de la laïcité, que Kamel Bencheikh considère comme le pilier de la démocratie et de la coexistence harmonieuse. Il s’insurge contre l’affaiblissement progressif de ce principe, en particulier dans les institutions éducatives, où l’autocensure face aux revendications identitaires gagne du terrain. Pour lui, cette érosion n’est rien de moins qu’un aveu de faiblesse des sociétés occidentales, prêtes à sacrifier leurs principes fondamentaux au nom d’une paix sociale illusoire.
L’auteur dénonce des compromis qu’il juge dangereux, notamment l’absence de soutien institutionnel envers les enseignants et le recul du discours républicain dans les espaces publics. Il critique également les failles des lois actuelles, comme celle de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, qu’il estime inadaptée face aux nouvelles formes de radicalisme religieux. Parmi les mesures qu’il préconise, Kamel Bencheikh propose d’élargir la neutralité religieuse dans les espaces publics, de mieux surveiller les financements étrangers des associations religieuses et de bannir les pratiques ostentatoires qui s’opposent à la neutralité républicaine.
Pour lui, préserver la laïcité n’est pas seulement un impératif français, mais une condition essentielle pour garantir la liberté, l’égalité et la fraternité.
Une réflexion nourrie par une expérience personnelle
Le combat pour la laïcité de Kamel Bencheikh puise ses racines dans son histoire personnelle. Né en Algérie, il a été témoin de la montée des courants rigoristes qui, selon lui, ont perverti les pratiques religieuses traditionnelles et détruit le tissu social de son pays d’origine. Cette expérience nourrit une analyse globale : pour Bencheikh, l’islamisme n’est pas une simple question de foi, mais un projet politique visant à exploiter les failles des démocraties occidentales pour y imposer ses propres règles.
Son engagement pour la laïcité, qu’il qualifie de principe fondateur de son identité d’écrivain et de citoyen, trouve également écho dans son œuvre littéraire. Dans Un si grand brasier, il explore les bouleversements de la révolution agraire en Algérie, tandis que son recueil de poèmes Printemps de lutte et d’amitié célèbre l’idéal universaliste des Lumières. C’est donc avec une voix profondément ancrée dans l’expérience et le combat qu’il aborde la question de l’islamisme dans cet essai.
Une menace globale et une réponse insuffisante
Kamel Bencheikh élargit son analyse au-delà du contexte algérien pour dresser un tableau alarmant de la montée de l’islamisme à l’échelle mondiale. Selon lui, cette idéologie s’attaque directement aux valeurs démocratiques en exploitant leurs propres principes – liberté, tolérance, égalité – pour les affaiblir de l’intérieur.
Il pointe du doigt les réponses politiques occidentales, qu’il juge trop fragmentées et incohérentes. L’auteur souligne notamment le manque de volonté des États européens à adopter des stratégies fermes pour contenir cette menace. L’éducation, en particulier, devient un champ de bataille idéologique, où les valeurs républicaines se heurtent à des revendications identitaires croissantes.
Une lumière d’espoir au milieu des ténèbres
Malgré un constat grave, l’essai n’est pas dénué d’espoir. Kamel Bencheikh met en lumière les luttes courageuses menées dans le monde musulman par des réformateurs et des mouvements progressistes. Il salue, par exemple, le mouvement iranien Femme Vie Liberté, ainsi que d’autres initiatives visant à réconcilier pays du sud et modernité.
Pour lui, ces mouvements, bien qu’encore minoritaires, incarnent une dynamique prometteuse. Il exhorte les sociétés occidentales à soutenir ces acteurs du changement, convaincu que leur succès pourrait constituer un rempart contre l’expansion de l’islamisme.
Un manifeste pour l’action collective
L’islamisme ou la crucifixion de l’Occident dépasse le simple essai analytique. C’est un appel à la vigilance collective et à l’action. Kamel Bencheikh interpelle ses lecteurs sur la fragilité des démocraties, insistant sur la nécessité de réaffirmer les principes universels qui en sont le socle. La laïcité, loin d’être un principe d’exclusion, est pour lui la clé d’une coexistence harmonieuse entre croyants et non-croyants.
Comme le rappelle Stéphane Rozès dans sa préface, la France reste un modèle unique, garantissant une liberté de culte et de conscience grâce à son héritage républicain. Mais Bencheikh avertit : cet équilibre est aujourd’hui menacé, et sa préservation exige un sursaut collectif.
Penser et protéger l’avenir
Cet ouvrage s’adresse à tous ceux qui s’interrogent sur la manière de préserver les sociétés modernes face aux défis posés par l’islamisme. Plus qu’un cri d’alarme, il invite à une mobilisation en faveur des valeurs universelles. Dans ce combat, Kamel Bencheikh ne voit pas seulement une défense des démocraties occidentales, mais aussi un enjeu civilisationnel global : préserver les idéaux d’un monde fondé sur la liberté, l’égalité et la fraternité.