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Victor Velter/shutterstock
Condamnation

L’extrême droite n’en sort pas affaiblie

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Mise à jour le 10 avril 2025
Temps de lecture : 6 minutes

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Extrême droite Justice

La condamnation de Marine Le Pen, de huit anciens eurodéputés du Rassemblement national et d’autres cadres du parti donne lieu à un de ces numéros médiatiques qui ne nous étonne même plus, tant l’absence de renouvellement tient lieu de ringardise.

Après le prononcé du jugement et de la peine : Énorme surprise ! À en croire les médias mainstream, personne ne pouvait s’y attendre ! Nous voilà en pleine République des juges, s’étrangle l’extrême droite. Éric Ciotti dénonce une « cabale judiciaire indigne » et s’inquiète du destin démocratique de notre nation. « La France est-elle encore une démocratie ? » interroge-t-il. « Ce n’est pas aux juges de décider pour qui doit voter le peuple », s’indigne Éric Zemmour.

Et alors que Marine Le Pen, affichant sa colère et son mépris, a quitté la salle d’audience avant même le prononcé du détail de sa peine, l’annonce de son inéligibilité immédiate lui ayant suffi, Marion Maréchal joue la carte victimaire. Laurent Wauquiez pense comme elle : « Il n’est pas sain que dans une démocratie, une élue soit interdite de se présenter à une élection. » Et d’ajouter, au micro de BFM TV : « cette décision va nécessairement avoir un poids très lourd sur le fonctionnement de notre démocratie. »

Après Sarkozy, Le Pen

Où va-t-on ? Pour la droite et l’extrême droite, un juge qui juge contre un des leurs est donc un magistrat qui fait de la politique. Voire un magistrat irresponsable. Dans le cas actuel de l’affaire Sarkozy (celle du dossier libyen), on nous assure que, quelle que soit la décision des juges, c’est notre République qui sortira affaiblie. C’est la première fois qu’une peine de 7 ans d’emprisonnement est requise contre un ancien président de la République. Les détracteurs du Parquet national financier (PNF) se souviennent-ils qu’il n’est plus en exercice, n’exerce aucun mandat politique et n’en sollicite aucun autre ? Se souviennent-ils aussi que l’ancien président porte un bracelet électronique, fruit de sa condamnation dans l’affaire des écoutes et d’un « pacte de corruption » ?

Mais cette fois, on veut reprocher à la justice d’empêcher une responsable politique de se présenter à la future élection présidentielle. L’exécution provisoire est ici mise en cause par les détracteurs des juges parisiens. Là encore, nous assistons, avec la décision du tribunal de Paris, à une première. Faut-il pour autant remettre en cause la justice et parler de « République des juges ? »

« La justice est la justice »

Marine Le Pen a été reconnue coupable par le tribunal de Paris, ce lundi matin 31 mars, de détournement de fonds publics. Elle a donc été condamnée à une peine de quatre ans d’emprisonnement dont deux ans ferme, aménageable avec un bracelet électronique. Elle est aussi condamnée à 100 000 euros d’amende et à cinq ans d’inéligibilité, avec donc, exécution provisoire. À moins d’une décision exceptionnelle ou d’une grâce présidentielle, elle ne pourra effectivement pas être candidate à l’Élysée en 2027.

« La justice est la justice », réagit le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, sur X. « ’’Selon que vous serez puissant ou misérable’’ comme écrivait La Fontaine, elle doit être la même pour tous. D’autant que Mme Le Pen est une responsable politique qui exige plus de fermeté de la part de la justice ».

Dans un communiqué, le PCF estime que « La justice ne doit pas faire de distinction entre les puissants et les citoyens. C’est là un fondement inébranlable et la garantie de la démocratie. La séparation des pouvoirs doit être respectée. Les institutions républicaines doivent fonctionner librement sans pression politique. Ce jugement doit être considéré pour ce qu’il est : le rappel de l’égalité devant la loi et la nécessaire probité des représentants. »

Quant aux cris d’orfraie du RN et de ses soutiens, il n’est pas inutile de rappeler qu’en avril 2013, à propos de l’affaire Cahuzac, Mme Le Pen réclamait l’inéligibilité à vie pour les élus condamnés pour détournement de fonds publics ! Par ailleurs, la défense des élus RN n’a pas arrangé les choses lorsqu’ils ont nié les accusations. Mme Le Pen n’est-elle pas avocate ?

Cette condamnation n’est pas une victoire politique

Aujourd’hui, bien sûr, les militants et partis de gauche peuvent se réjouir de la décision du tribunal et de la mise hors-jeu de l’ex-présidente du RN. Ne voilà-t-il pas, après tout, une belle revanche après l’exercice de réhabilitation de Jean-Marie Le Pen, lors de sa disparition, après la consolidation d’une extrême droite internationale à laquelle participe le RN, après le voyage en Israël de Jordan Bardella ?

C’est là que la gauche devrait éviter de se réjouir trop vite. La montée de l’extrême droite n’est pas due au hasard. Les électeurs et électrices du RN ne sont pas forcément d’ignobles fachos. Nombreux sont celles et ceux qui, dans les milieux populaires notamment, ont perdu leur emploi, se sont vus abandonnés et déclassés après la casse de leurs entreprises, de leur industrie. Les scores enregistrés dans les Hauts-de-France par le RN sont hélas éloquents. À Hénin-Beaumont, fief de Marine Le Pen, les habitants ont prévenu qu’ils laisseraient éclater leur colère en cas de condamnation.

La décision des juges parisiens ne revêt pas de déni démocratique. La vraie question qui demeure est celle du quotidien de très nombreux électeurs qui ont le sentiment de se voir déposséder de leurs voix, de leur expression, de leur espoir. C’est là que se situe le drame. C’est là que l’extrême droite, loin d’être affaiblie, demeure fermement en embuscade.

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