Nous glorifions aussi les « Lumières », cette nébuleuse qui a ébranlé le pouvoir monarchique et religieux dans notre pays, et qui a préparé les esprits à l’avènement de la République. Dans cette culture qui nous imprègne, certains penseurs nous servent de repères, et les débats récents sur les condamnations pénales de personnages politiques ont rappelé l’importance de la séparation des pouvoirs, ce socle institutionnel défini par Montesquieu. Aussi, quand dans la lecture de l’Esprit des Lois, on tombe sur De l’esclavage des nègres, le choc est brutal, et Montesquieu passe d’un coup de l’image d’un sage raisonnable à celle d’un pourfendeur de l’humanité.
Il est bien évident que notre première réflexion s’interroge sur la temporalité. Qu’est-ce qui peut expliquer qu’en 1748, un « sage » en vienne à dénier l’humain chez des individus à la peau noire ?
Mais il faut bien lire l’intitulé de ce texte : « Si j’avais à soutenir le droit que nous avons eu de rendre les nègres esclaves, voici ce que je dirais… »
Les arguments ne sont pas les siens, ils sont monstrueux et absurdes, ce sont ceux des esclavagistes. Et Montesquieu les reprend sur un ton parfaitement raisonnable pour les…