Et si la solution au fléau des déchets plastiques venait du règne fongique ? Plusieurs espèces de champignons microscopiques, présentes dans les sols tropicaux, les milieux marins ou même les décharges, sont capables de dégrader des plastiques réputés quasi-indestructibles comme le polyéthylène, le polypropylène ou le polyuréthane.
L’un des plus prometteurs est Aspergillus tubingensis, découvert en 2008 au Pakistan. En laboratoire, il est parvenu à décomposer jusqu’à 90 % d’un échantillon de polyuréthane en trois semaines seulement. Ce champignon produit des enzymes spécifiques capables de casser les longues chaînes de polymères, rendant la matière plus simple à absorber ou à recycler.
Des super-pouvoirs fongiques encore peu exploités
Une autre espèce, Pestalotiopsis microspora, découverte en Amazonie en 2011, est capable de digérer du plastique sans oxygène, ce qui ouvre la voie à des applications en décharge ou dans des systèmes fermés. D’autres champignons marins comme Parengyodontium album dégradent les plastiques exposés à la lumière, tandis qu’Engyodontium et Aspergillus terreus réduisent la masse du polypropylène de 27 % en trois mois, si le plastique a été fragilisé par les UV ou la chaleur.
Ces découvertes restent pour l’instant cantonnées aux laboratoires, mais des essais en conditions réelles ont débuté depuis 2024, notamment en Inde, en Allemagne et au Canada. À terme, ces champignons pourraient intégrer des bioréacteurs industriels, voire être utilisés pour le traitement in situ de déchets dans les zones fortement polluées.
Une voie prometteuse s’ouvre donc : celle de la bioremédiation par les champignons, une solution naturelle à un problème global, pour peu que les moyens suivent.
Comment ça marche ?
Les champignons décomposent les plastiques en sécrétant des enzymes comme des estérases, des laccases ou des oxydoréductases. Ces enzymes « coupent » les longues chaînes de polymères en unités plus simples. Ces fragments peuvent ensuite être absorbés comme nutriments par le champignon, ou recyclés biologiquement. Certaines souches n’ont même pas besoin d’oxygène ni de nutriments supplémentaires, ce qui les rend utiles en milieux extrêmes (décharges, sols profonds).
Découverte majeures | |
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2008 | Découverte d’Aspergillus tubingensis au Pakistan |
2011 | Identification de Pestalotiopsis microspora en Amazonie |
2017 | Confirmation en laboratoire : 90 % de polyuréthane dégradé en 3 semaines |
2018–2020 | Études sur Parengyodontium album, champignon marin |
2021–2023 | Test sur le polypropylène (Engyodontium, A. terreus) |
2024–2025 | Lancement d’essais de bioréacteurs fongiques en laboratoire |
2027–2029 | Phase pilote dans des centres de traitement des déchets |
2030+ | Espoir d’une commercialisation à l’échelle industrielle |