Si le projet chinois a été lancé il y a maintenant plus de 10 ans, les travaux ont débuté en 2018. Le chantier n’aura finalement duré que trois ans, au lieu des six années initialement prévues. Après deux ans à contrôler la conformité de l’installation, les autorités environnementales ont accordé l’autorisation d’exploitation.
Un des avantages de ce type de réacteur, c’est qu’il n’a pas besoin d’être construit près d’un cours d’eau, car c’est le sel fondu qui sert de fluide de refroidissement, contrairement aux centrales classiques. C’est la raison pour laquelle la Chine a choisi d’installer son premier réacteur à sels fondus en plein désert de Gobi, à 110 km de Wuwei, pour un investissement de 535 millions d’euros.
La Chine n’est pas la première à construire un réacteur au thorium, mais aucune tentative n’avait jusque-là dépassé le stade expérimental. Le prototype mis en service est d’une puissance modeste puisqu’il est censé pouvoir produire de l’énergie pour moins de 1000 habitants. Ce petit surgénérateur expérimental de 2 mégawatts électrique (MWe) est à titre de comparaison beaucoup moins puissant qu’un réacteur nucléaire en France qui s’élève entre 900 et 1 500 MWe.
Mais si les tests à venir satisfont les autorités chinoises, celles-ci lanceront un programme pour bâtir un réacteur capable de générer de l’électricité pour plus de 100 000 foyers.
Vers la renaissance des surgénérateurs nucléaires ?
On comprend donc que si ce réacteur parvient à répondre aux défis technologiques imposés par le thorium, il pourrait positionner la Chine comme leader mondial des technologies nucléaires. Trois à quatre fois plus abondant sur Terre que l’uranium, le thorium multiplie les avantages.
Sous l’action d’un catalyseur, ce métal argenté peu radioactif peut déclencher une réaction en chaîne permettant, non seulement, de produire de l’énergie, mais aussi du combustible supplémentaire. Grâce au phénomène appelé « surgénération », le réacteur produirait moins de déchets radioactifs et serait d’une plus grande efficacité. C’est également la surgénération qui était au cœur des réacteurs français à neutrons rapides Rapsodie, Phénix, Superphénix, et du programme Astrid, tous les quatre abandonnés ; ce qui illustre les renoncements du pays.
Certes, la faisabilité des réacteurs à sels fondus est encore sujette à caution. Le casse-tête technique tient au fait qu’à très forte température, le sel devient corrosif pour les structures du réacteur et il faut trouver le moyen de les protéger de la corrosion. C’est pourquoi les tests réalisés par la Chine sur leur nouveau réacteur vont être suivis de très près pour savoir comment les ingénieurs ont surmonté cet obstacle.
Pour autant, il ne faut pas se réjouir trop vite. Le problème avec les produits corrosifs, c’est qu’on ne s’en rend compte qu’après cinq à dix ans. La technologie est prometteuse et de nombreux défis sont encore à surmonter.
Loin d’être une nouvelle découverte, ce métal argenté que l’on trouve souvent dans les roches ignées et les sables à minéraux lourds est connu depuis presque deux siècles. Son nom proviendrait de « Thor » dieux du Tonnerre dans la mythologie nordique.