Pourtant, malgré une dynamique initialement promise comme ambitieuse en matière de production bas-carbone, notamment avec le nucléaire, le gouvernement rétropédale, tandis que les tensions politiques autour des choix énergétiques s’exacerbent.
De l’ambition à la reculade
En 2020, le gouvernement visait pour 2030 le chiffre de 6,5 GW de capacités d’électricité nucléaire pour procéder à l’électrolyse de l’eau afin d’obtenir un hydrogène bas-carbone, qui, aujourd’hui, est produit à 94 % par des énergies fossiles comme le gaz naturel par vaporeformage.
En 2024, il a ramené cet objectif à 4,5 GW [1], évoquant des retards industriels, la hausse des coûts de l’électricité, bref une volonté politique beaucoup moins volontariste. Or ce choix contrevient à la demande croissante de décarbonation et suscite l’inquiétude chez les acteurs du secteur.
Une nouvelle nomenclature carbone
Jusqu’en 2023, l’on différenciait hydrogènes « gris, bleu, vert, jaune » selon leur mode de production. En 2024, la France a adopté une classification basée sur l’empreinte carbone réelle afin d’aligner sa stratégie sur le paquet européen nommé « Fit for 55 ». Cette approche place désormais dans un seul groupe l’hydrogène issu du nucléaire, celui des renouvelables et même du fossile avec captage dans une même catégorie dite « bas‑carbone », ce qui obscurcit notamment la réalité de la production d’hydrogène produit grâce au nucléaire [2].
L’Union européenne, sous la pression de l’Allemagne, voit d’un mauvais œil les perspectives qui s’ouvrent en France grâce à son parc nucléaire qui inquiètent de nombreux lobbys des énergies fossiles.
Offensive politique contre la transition
Le 19 juin 2025, un moratoire sur le tout nouveau projet éolien et solaire a été voté lors de l’examen de la loi énergie‑climat, porté par Les Républicains et soutenu par le RN [3]. Cette mesure, qualifiée d’« irresponsable » notamment par les professionnels des énergies renouvelables, montre une offensive de la droite et de l’extrême droite contre les politiques de décarbonation. Presque tous les acteurs (industrie, solaire, éolien, agriculteurs, électricité) critiquent le moratoire comme risqué pour l’emploi, l’investissement, la souveraineté énergétique et la décarbonation. Le président du Syndicat des énergies renouvelables, Jules Nyssen, parle d’un texte « d’irresponsabilité énergétique », menaçant des dizaines de milliers d’emplois, la filière regroupant 160 000 salariés [4].
Le PCF exige plus d’ambition
Le Parti communiste français, qui fait référence dans le paysage politique sur les questions scientifiques, environnementales et industrielles, a dénoncé cette attaque contre la transition énergétique et s’est opposé à cet amendement. Il fustige les reculs successifs des ambitions affichées — y compris dans les textes de décarbonation — qu’il qualifie de « détricotage » sous influence des lobbys.
Pour le PCF, qui a produit un plan climat soumis au débat des citoyens, seule une planification publique avec la création d’un pôle public de l’énergie peut garantir la sortie des énergies fossiles, avec notamment la construction de 20 EPR2 (réacteurs plus puissants qu’aujourd’hui) et 12 SMR (petits réacteurs), la protection des barrages, un soutien massif aux renouvelables et à l’électrification — sans opposer nucléaire et énergies renouvelables [5].
Un avenir énergétique à clarifier
L’hydrogène jaune peut jouer un rôle essentiel voire primordial dans la décarbonation si l’hydrogène devient un véritable objectif en faveur du développement de l’industrie et des transports, mais il dépend d’un cadre stratégique stable, d’un engagement industriel clair et d’une vision politique cohérente, bref d’une véritable planification nationale portée par une volonté des travailleurs, des élus et des entreprises.
Or la baisse des objectifs du gouvernement et le moratoire législatif sur les renouvelables questionnent la capacité de la France à tenir ses engagements climatiques. L’essentiel reste à décider : combat pour une vraie ambition climatique ou renoncement sous pression des forces rétrogrades ? Faute de véritable ambition et sous pression de certains lobbys, la France prend encore du retard pour un vrai mix énergétique, mais aussi dans la course mondiale à l’hydrogène, elle recule dans la lutte pour une baisse générale des émissions de dioxyde de carbone.
Il est par conséquent de plus en plus urgent que les collectivités, les syndicats, les associations et l’ensemble de nos concitoyens prennent la mesure de ce recul, se rassemblent et agissent pour une planification publique et nationale de la production d’énergie.