Le développement de terminaux comme Sea Port Oil Terminal (SPOT) reflète les tensions entre objectifs économiques et urgence climatique.
Des infrastructures gigantesques au service d’une énergie polluante
Le gaz naturel liquéfié (GNL) est présenté comme une solution stratégique pour diversifier les approvisionnements énergétiques mondiaux. Des projets titanesques comme le Sea Port Oil Terminal (SPOT), en construction au large des côtes texanes, sont censés répondre à une demande croissante d’hydrocarbures. Avec une capacité prévue de 2 millions de barils par jour, SPOT devrait désengorger les infrastructures terrestres saturées et offrir des solutions logistiques pour les supertankers destinés aux marchés asiatiques et européens.
Mais cette expansion a un coût environnemental massif. La chaîne d’approvisionnement du GNL est énergivore : la liquéfaction, le transport par méthanier et la regazéification consomment deux fois plus d’énergie que le transport par gazoduc. Pire encore, les fuites de méthane, un gaz à effet de serre 28 fois plus puissant que le CO2, sont fréquentes à chaque étape. SPOT, à lui seul, pourrait émettre des millions de tonnes de CO2 par an, soulignant les contradictions entre l’essor du GNL et les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Par ailleurs, une part importante du GNL américain provient du gaz de schiste, dont l’extraction repose sur la fracturation hydraulique. Cette technique est à l’origine de dégâts considérables : pollution des nappes phréatiques, émissions massives de méthane, et destruction des écosystèmes locaux. En 2021, les émissions liées au gaz de schiste aux États-Unis étaient équivalentes à celles de 482 millions de tonnes de CO2. Transformé en GNL, ce gaz multiplie son impact climatique à travers une chaîne logistique intensive et destructrice.
L’Union européenne, pourtant engagée dans des objectifs ambitieux de neutralité carbone, participe à ce paradoxe. En augmentant ses importations de GNL américain, elle ferme les yeux sur les ravages environnementaux causés par le gaz de schiste et sur l’empreinte carbone aggravée par sa transformation et son transport.
Des impacts environnementaux et géopolitiques
L’impact environnemental du GNL ne se limite pas aux émissions directes. Les terminaux comme SPOT, Plaquemines LNG ou Rio Grande LNG menacent également les écosystèmes marins environnants, perturbés par les opérations offshores et les risques de pollution.
Sur le plan géopolitique, l’expansion du GNL américain s’inscrit dans une stratégie de domination des marchés mondiaux. En devenant le premier exportateur de GNL, les États-Unis concurrencent directement des acteurs historiques comme la Russie ou le Qatar. Cette suprématie énergétique renforce leur influence géopolitique, mais expose également les pays importateurs à une nouvelle dépendance fossile, verrouillée par des contrats de long terme.