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Hydrogène

Décarboner, réindustrialiser, planifier, un enjeu stratégique pour la France

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Mise à jour le 25 juillet 2025
Temps de lecture : 6 minutes

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Industrie PCF Environnement Énergie Hydrogène

Une nouvelle coalition occidentale, la Global Hydrogen Mobility Alliance (GHMA), a récemment interpellé Emmanuel Macron pour réclamer un plan ambitieux en faveur de la mobilité hydrogène. Elle appelle à des investissements massifs, au déploiement d’infrastructures et à la création d’emplois industriels en Europe.

Si son approche reste dictée par les intérêts des grands groupes capitalistes, elle fait écho, à sa manière, au plan climat Empreinte 2050 du Parti communiste français (PCF), qui articule transition écologique, souveraineté énergétique et industrialisation planifiée, mais lui, dans une logique de progrès social et environnemental.

Derrière cette mobilisation des industriels, une inquiétude affleure : le risque de décrochage de l’Europe face à l’avance de la Chine dans la filière hydrogène.

Une coalition de grands groupes pour une filière stratégique

La GHMA regroupe des géants de l’automobile, de la chimie et des technologies : Toyota, Honda, Daimler Truck, Iveco, BMW, Air Liquide, Ballard, Cummins, Honeywell… Elle entend faire de l’hydrogène un pilier de la mobilité propre européenne.

Son message est clair : l’Europe doit rattraper ses retards réglementaires, d’investissement et d’infrastructures, sous peine de perdre la bataille mondiale — et de faire perdre beaucoup d’argent aux actionnaires des groupes concernés.

La GHMA exprime son inquiétude face à l’avance chinoise : plus de 28 000 véhicules à hydrogène, 500 stations de ravitaillement, et 1 150 km de corridors logistiques pour poids lourds déjà en service. Toyota alerte : la Chine s’apprête à dominer le marché du transport lourd et à en réduire drastiquement les coûts.

Les fabricants européens d’électrolyseurs tirent aussi la sonnette d’alarme. La Chine contrôle déjà 40 % des capacités mondiales. D’où l’appel de la GHMA à des politiques industrielles fortes, incluant des critères « Made in Europe » pour l’attribution des aides via la Banque européenne de l’hydrogène.

Le plan climat du PCF : une alternative cohérente

Face à ces défis, le PCF propose une réponse cohérente autour de cinq grands axes :

  1. Un mix énergétique 100 % public et décarboné. Nucléaire et renouvelables permettraient de sécuriser une production stable d’électricité bas-carbone, et pour la production d’hydrogène nécessaire à une électrolyse verte à grande échelle. Un pôle public de l’énergie piloterait cette production dans l’intérêt général.
  2. Des investissements massifs pour une nouvelle industrie. Le PCF propose un effort à hauteur de 7 à 8 % du PIB annuel, via un pôle bancaire public soutenu par la BCE. Objectif : financer la production industrielle dont celle de véhicules, chaînes d’approvisionnement, dont des stations hydrogène et les infrastructures nécessaires.
  3. Une planification territoriale et industrielle. Création de hubs régionaux hydrogène, intégrant industrie, logistique et transport. L’emploi serait soutenu par un Pacte de sécurité emploi-formation. Selon la GHMA, 500 000 emplois pourraient être créés d’ici à 2030 en Europe dans la filière hydrogène. Sachant qu’un emploi industriel génère entre 2 et 4 emplois, l’impact est potentiellement très large. Le plan du PCF permettrait de les ancrer durablement sur le territoire.
  4. Une complémentarité hydrogène – nucléaire – renouvelables. Le PCF défend un mix énergétique équilibré et piloté publiquement pour garantir une offre électrique stable, indispensable au développement d’une filière hydrogène compétitive et fiable.
  5. Une coopération européenne coordonnée mais souveraine. L’Europe doit disposer d’une stratégie industrielle commune avec des subventions et infrastructures partagées. Mais cette stratégie doit respecter la souveraineté énergétique de chaque nation, ce qui aujourd’hui n’est pas le cas, on l’a vu avec l’Allemagne anti-nucléaire civil que la Commission européenne privilégie contre la France.

Concurrence mondiale ou coopérations multipolaires ?

La mobilisation de la GHMA reflète aussi la volonté des monopoles occidentaux de maintenir leur domination sur le marché mondial de l’énergie. Les actionnaires veulent que l’argent public serve leurs intérêts. Il est donc urgent d’exiger que ces subventions soient conditionnées à des critères sociaux, environnementaux et apportent des résultats probants.

La Commission d’enquête sénatoriale créée en janvier dernier, dont le président est LR et le rapporteur est communiste, a déjà révélé qu’on ignore ce que deviennent les fonds publics versés aux entreprises. Il faut mettre fin à cette opacité.

Plutôt que d’entrer dans une logique de confrontation avec la Chine, la France pourrait rechercher des coopérations industrielles, technologiques et diplomatiques, y compris avec elle et les pays du Sud global.

Elle jouerait ainsi un rôle actif dans un monde multipolaire, en dialogue avec les BRICS, au lieu de s’enfermer dans une logique euro-atlantique alignée sur les États-Unis.

Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier

La filière hydrogène française ne doit pas tout miser sur le bloc occidental qui dépend trop des États-Unis et de leur instabilité politique avérée. Elle a intérêt à adopter une stratégie multilatérale et ouverte, fondée sur des partenariats équilibrés.

Le plan climat Empreinte 2050 n’est pas seulement un cadre écologique. C’est un outil d’action concret pour les travailleurs, ingénieurs, élus, et collectivités. Il permet d’investir, se former, produire et planifier, dans une logique de bien commun.

En son sein, la production d’hydrogène et ses applications peuvent devenir un levier de souveraineté industrielle, de création d’emplois durables et de coopérations internationales équilibrées, à condition de sortir des dogmes du libéralisme et de l’économie de guerre imposée par le pouvoir.

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