Pas toujours simple de choisir au vu de l’offre régionale ; mais pas si compliqué depuis l’invention d’Internet. Il suffit de taper « où pêcher ? ». Et le moteur de recherche vous déroule des pages de propositions.
Malheureusement, au milieu de celles-ci, deux lignes attirent l’œil... « Arrêté inter-préfectoral portant interdiction […] de certaines espèces de poissons pêchés […] du Nord et du Pas-de-Calais ». Encore un paysan qui a foutu du lisier dans la rivière, ou une usine qui a dégazé sans contrôle… On lit, on cherche… et rien de tout ça ! C’est pire…
Toutes nos rivières polluées aux PCB
L’arrêté se répète régulièrement depuis une dizaine d’années sans qu’on y prête trop d’attention. Il fait suite aux « analyses en dioxines, PCB [1] et mercure des poissons pêchés en 2010 dans les cours d’eau des bassins Artois-Picardie, Rhin-Meuse, Loire-Bretagne, Rhône-Méditerranée et Seine-Normandie dans le cadre du plan national d’actions sur le PCB ».
14 ans plus tard, les taux de contamination en dioxine et PCB sont toujours supérieurs aux maximales et dangereux pour la santé. On interdit donc la consommation, la commercialisation, la détention dans les secteurs de :
- la Deûle et du canal de Roubaix : de toutes les espèces de poissons… ;
- l’Aa et ses canaux, la Scarpe et la Liane : des anguilles et des espèces fortement bioaccumulatrices (carpes, brèmes, barbeaux, silures)
- la Sambre et de l’Helpe Mineure et Majeure : de tous les poissons de plus de 900 g et les anguilles ;
- la Lys et de la Clarence : des anguilles et des poissons fortement accumulateurs ;
- l’Escaut : de toutes les espèces entre 1.100 kg et 1.400 kg, et des anguilles ;
- la Canche et de la Ternoise : des anguilles ;
- l’Oise : de tous les poissons de l’Esches, l’Avre et des Trois Doms ; et des anguilles.
Et la liste n’est pas exhaustive…
L’affaire touche toute la France puisque 60 départements sont concernés par cette pollution. En cherchant un peu, on constate que les associations de pêche interviennent régulièrement, parfois en demandant la levée des interdictions… Souvent en demandant des actes de dépollution. En vain.
L’État : il est urgent de ne rien faire !
Pourtant, un plan PCB 2008-2013 a été engagé, dans le Rhône, pour conclure… que ces polluants « demeureront dans les rivières pour les décennies à venir ». Remarquable recommandation du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD).
Depuis ce rapport, il est donc devenu urgent de ne rien faire ; d’attendre que la nature se charge d’éliminer le polluant. Le problème est que la nature… c’est nous !
En 2001, sur les PCB, l’Agence américaine de protection de l’environnement condamnait General Electric à décontaminer 500 km de l’Hudson qu’elle avait pollué. Ces opérations de dragage sont les plus onéreuses et les plus compliquées de l’histoire des États-Unis. Mais en 15 ans, les améliorations sanitaires ont été spectaculaires.
Serait-ce à dire qu’en France le « laisser-polluer » serait dû à un manque de volonté politique du pouvoir ?
Compte tenu de l’enjeu de santé publique, la mise en œuvre d’un grand plan national de dépollution des PCB est plus que jamais d’actualité. À ce compte, peut-être pourra-t-on à nouveau manger la carpe pêchée la veille sans craindre pour sa santé.