Les ménages, malgré les subventions existantes (MaPrimeRénov’, certificats d’économies d’énergie…), hésitent à franchir le pas face au coût élevé des installations. L’engouement initial a laissé place à un marché fragile et incertain.
Fermetures annoncées et menaces sociales
Cette crise a déjà des conséquences concrètes. BDR Thermea, propriétaire de l’usine De Dietrich à Mertzwiller en Alsace, a annoncé la fin de son activité industrielle de pompes à chaleur d’ici 2027. Résultat : environ 320 postes supprimés, avec un transfert de la production vers la Slovaquie et la Turquie. Pour les salariés, c’est un « crève-cœur », d’autant plus douloureux que ce site faisait partie du projet de relocalisation voulu par l’État.
Dans le même temps, le groupe Atlantic prévoit la construction d’une nouvelle usine en Saône-et-Loire, financée en partie par les crédits d’impôt pour l’industrie verte. L’investissement annoncé est de 150 millions d’euros pour 300 emplois créés, avec une capacité annoncée de 150 000 unités par an. Mais cette initiative ne compense pas la fermeture en Alsace et illustre une stratégie d’implantations dispersées, sans réelle cohérence d’ensemble.
Un objectif gouvernemental percuté par sa propre politique d’austérité
Le gouvernement maintient l’objectif d’un million de pompes à chaleur produites par an en 2027. Pourtant, le décalage entre cette ambition et la réalité industrielle saute aux yeux. Les industriels alertent sur une année 2025 particulièrement difficile, marquée par des plans sociaux et une visibilité réduite. Le pouvoir d’achat des familles susceptibles de s’équiper est en berne, et aucun mécanisme de régulation ni de planification n’existe pour organiser la filière.
En réalité, cette crise met en lumière les limites d’une approche strictement libérale de la réindustrialisation. Le gouvernement distribue des aides publiques massives aux entreprises, sans imposer de contreparties sociales ou environnementales. Les fermetures de sites, les délocalisations et la précarisation des salariés se poursuivent malgré les subventions.
De plus, l’absence d’une planification industrielle concertée avec l’ensemble des acteurs – entreprises, chercheurs, collectivités, salariés – empêche toute vision cohérente de long terme. Le refus obstiné de constituer un pôle public de l’énergie et un pôle public financier des banques et assurances, qui impliqueraient des nationalisations et une maîtrise publique des filières stratégiques, condamne la France à subir la désindustrialisation au lieu de la combattre.
Les pompes à chaleur, qui devaient symboliser une renaissance industrielle au service de la transition écologique, deviennent aujourd’hui le reflet d’un nouvel échec. Tant que le gouvernement persistera dans une logique libérale, arrosant les entreprises de fonds publics sans exigence de résultats ni coordination nationale, la réindustrialisation restera un mirage.