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Économie

La vague silencieuse des défaillances d’entreprises

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Mise à jour le 5 septembre 2025
Temps de lecture : 4 minutes

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Emploi

Jamais depuis plus de dix ans la France n’avait connu autant de faillites d’entreprises. En 2024, plus de 63 000 sociétés ont fermé leurs portes. En 2025, le cap des 68 000 devrait être atteint, un niveau historique.

Derrière les chiffres, c’est la fragilité structurelle de notre tissu productif qui se révèle.

Un record de faillites qui s’installe dans la durée

Les très petites entreprises (TPE) constituent l’immense majorité des faillites, mais les PME et les structures de plus de 50 salariés sont aussi touchées de plein fouet. Le rythme s’est accéléré : +27 % de défaillances pour les entreprises de taille intermédiaire en un an, et +56 % depuis 2019.

Ces chiffres, loin d’être abstraits, signifient concrètement des dizaines de milliers d’emplois menacés ou perdus, et des territoires fragilisés. Pourtant, selon une enquête Ipsos, 64 % des salariés ne savent pas précisément ce qu’est une « défaillance d’entreprise ». Pire encore, seuls 15 % connaissent l’existence des procédures d’alerte ou des dispositifs d’accompagnement censés anticiper ces situations. La majorité des travailleurs découvrent la faillite de leur employeur au moment où il est déjà trop tard.

Les causes d’une hémorragie

Cette vague n’a rien de « naturelle ». Elle s’explique par des choix économiques et des contraintes financières toujours plus lourdes.

D’abord, la remontée brutale des taux d’intérêt – passés de 1 % en 2021 à plus de 4 % en 2024 – a asphyxié le secteur immobilier et freiné l’investissement productif. Dans la construction, on compte près de 15 000 faillites en un an, avec des hausses vertigineuses : +36 % pour la maçonnerie, +65 % pour les revêtements de sols.

Ensuite, l’inflation des prix de l’énergie et des matières premières, loin d’être absorbée, continue d’affaiblir des secteurs clés comme le transport ou l’industrie. Le fret routier interurbain a vu les défaillances bondir de près de 50 % en un an.

À cela s’ajoutent les dettes héritées du Covid, notamment les fameux Prêts Garantis par l’État (PGE), qui sont arrivés à échéance. Beaucoup d’entreprises, déjà fragiles, doivent rembourser alors même que leur trésorerie s’est effritée.

Enfin, c’est la structure même de notre économie qui s’effrite. La France reste un pays dominé par des TPE et PME interconnectées les unes aux autres. Lorsque certains maillons s’écroulent, les autres en pâtissent. Résultat : le tissu productif se fragilise, secteur par secteur, sans politique industrielle de long terme pour le consolider.

Des salariés laissés dans le flou

Côté salarié, des mécanismes institutionnels existent. En théorie, les commissaires aux comptes et les comités sociaux et économiques (CSE) disposent de procédures d’alerte pour anticiper les difficultés. En cas de faillite, le régime de garantie des salaires (AGS) prend en charge le paiement des salaires impayés. Mais ces dispositifs sont largement méconnus. Selon l’étude publiée fin août, plus d’un salarié sur deux affirme ne pas savoir à qui s’adresser si son entreprise se retrouvait en difficulté financière.

Ce décalage entre la réalité économique et la perception des travailleurs dit beaucoup du climat actuel. Les faillites se multiplient, mais elles restent une « vague silencieuse », rarement visibles tant qu’elles ne frappent pas directement une usine, un commerce ou un service local. Pourtant, chaque défaillance entraîne des licenciements, des dettes impayées, une perte de savoir-faire et, bien souvent, une fragilisation durable d’un territoire.

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