L’abandon du projet Intel à Magdebourg, après la faillite de Northvolt, révèle une vérité brutale : l’argent public ne suffit pas à compenser les failles structurelles d’un continent déséquipé, frappé de plein fouet par la crise énergétique.
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En 2023, le gouvernement allemand annonçait en fanfare l’arrivée d’Intel à Magdebourg. Deux usines de semi-conducteurs, 30 milliards d’euros d’investissement, 10 milliards de subventions publiques et la promesse de faire de l’Allemagne un pilier du « Chips Act » européen. Deux ans plus tard, le projet est abandonné. Intel invoque une rentabilité impossible à atteindre. En cause : le coût de l’énergie, devenu insoutenable pour une industrie aussi énergivore. L’Allemagne, privée de gaz russe depuis la guerre en Ukraine et le sabotage des gazoducs Nord Stream, paie son électricité au prix fort. Même dopé aux aides publiques, le projet ne tient pas face à la réalité matérielle.
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Une situation qui n’est pas sans rappeler Northvolt, autrefois présenté comme le fer de lance européen des batteries, qui avait levé plus de 13 milliards de dollars auprès de Volkswagen, BMW ou Goldman Sachs. Mais en 2024, l’entreprise n’atteint que 5 % de sa capacité de production prévue. Les causes sont multiples : manque d’expérience industrielle, taux de rebut élevés, incapacité à valider le processus PPAP exigé par l’automobile et échec à appliquer les standards qualité comme l’AMDEC. En juin, BMW annule une commande de 2,15 milliards de dollars. La baisse des subventions aux véhicules électriques en Europe achève de fragiliser le modèle. Northvolt dépose le bilan fin 2024. Comme Intel, le projet s’est heurté à une Europe désarmée : énergie chère, dépendance technologique, et absence de maîtrise industrielle.
Le choc énergétique allemand
Depuis 2022, l’Allemagne subit un choc énergétique historique. La guerre en Ukraine a entraîné une rupture brutale des livraisons de gaz russe, aggravée par le sabotage des gazoducs Nord Stream. L’Union européenne a réagi par une série de sanctions boomerang contre Moscou, dont l’interdiction des transactions liées au gaz russe. Résultat : les prix du gaz et de l’électricité ont explosé. Pour l’industrie allemande, historiquement dépendante d’une énergie bon marché, c’est un coup de massue. De nombreuses usines ont ralenti ou fermé, précipitant une perte de compétitivité face aux États-Unis et à l’Asie.
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