Avec 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 166 millions de bouteilles vendues en 2024, cette mesure menace des milliers d’emplois dans un secteur qui fait vivre près de 75 000 personnes – indirectement. Une escalade commerciale qui pourrait plonger toute la filière viticole française dans une crise sans précédent.
L’engrenage guerrier
Reprenons depuis le début. Le 4 octobre 2024, l’Union européenne confirmait l’imposition de surtaxes allant jusqu’à 35,3 % sur les véhicules électriques fabriqués en Chine, pour une durée de 5 ans. En réponse, le ministère du Commerce chinois a demandé aux constructeurs automobiles chinois de suspendre leurs projets d’investissement dans les pays européens ayant soutenu cette taxe. Dans la foulée, Pékin annonçait des mesures de représailles en visant le cognac, les produits laitiers et la viande de porc.
L’escalade prend aussi effet à l’Ouest. Le 2 février 2025, Donald Trump menaçait d’imposer de nouveaux droits de douane sur les produits européens et accusait l’UE de ne pas importer suffisamment de voitures et de produits agricoles américains. Très vite, 25 % de surtaxes ont été imposées par Washington sur l’acier et l’aluminium européens. De son côté, L’UE a annoncé des droits de douane de 50 % sur le whisky américain, qui devraient entrer en vigueur le 1er avril 2025.
Dernier épisode en date, Donald Trump menace de mettre des droits de douane de 200 % sur tous les vins, champagnes et produits alcoolisés provenant de France et d’autres pays de l’UE.
Le cognac fait vivre près de 75 000 personnes
Avec près de 89 000 hectares concernés, la production de cognac représente à elle seule 10 % du vignoble français. Les chiffres sont gigantesques. Plus de 166 millions de bouteilles ont été exportées en 2024 pour un chiffre d’affaires qui s’élevait à 3 milliards d’euros. Cela équivaut à la vente de cinq bouteilles chaque seconde dans le monde. Cette production dépend directement des marchés internationaux puisque plus de 96 % de la fabrication est destinée à l’export ; la Chine et les États-Unis représentent à eux seuls plus de 60 % de ces exportations. Le calcul est vite fait : cette escalade commerciale se fait avant tout au détriment des travailleurs de la filière.
Mais cette crise fait grincer des dents dans tout le vignoble français. L’armagnac n’est pas en reste. Les ventes de cette eau-de-vie dépendent à 58 % de l’export avec trois marchés principaux : les États-Unis, la Chine et… la Russie. De leur côté, les vins du Pays d’Oc exportent l’équivalent de 15 millions de bouteilles chaque année aux États-Unis. Avec des droits de douane à 200 %, la bouteille pourrait passer à 60 dollars.
Lors de son premier mandat, Donald Trump avait engagé des taxes de 25 % sur ces vins et les résultats ne s’étaient pas fait attendre : la part de marché aux États-Unis avaient chuté de 30 %. « C’est toujours les mêmes qui trinquent » semble dire en chœur la filière.