À titre de comparaison, de 2016 à 2022, le rendement d’une obligation française était inférieur à 1 % ! Et les perspectives ne sont pas mauvaises pour les financiers :
- Plus la France est endettée et plus le « risque » de lui prêter à long terme est élevé, plus le rendement du prêt s’améliore (il est évidemment plus coûteux pour la France d’emprunter).
- Plus la France est endettée, plus elle doit emprunter aux marchés financiers (pour rembourser la dette existante). Vous êtes un fonds de pension américain ? Vous êtes sûr, en ce moment, que la France va vous proposer d’acheter toujours plus d’obligations avec des rendements de plus en plus intéressants.
Qui décide des taux d’intérêt de la dette française ?
Les taux (ou rendements) ne sont pas fixés par l’État, mais par « l’offre et la demande » sur les marchés financiers.
- Émission : quand l’Agence France Trésor met de nouvelles obligations en vente, les banques et investisseurs font des offres d’achat.
- Enchères : plus il y a d’acheteurs, plus le taux exigé est bas ; s’ils se montrent frileux, l’État doit proposer un rendement plus élevé pour les attirer.
- Marché secondaire : une fois émises, les obligations s’échangent librement entre investisseurs. Si la confiance baisse (par exemple parce que la dette augmente ou l’inflation est forte), leur prix chute et le rendement implicite grimpe.
En résumé, ce sont les investisseurs collectivement qui « font le prix », en fonction de leur perception du risque, de l’inflation attendue et des taux directeurs de la Banque centrale européenne.
La France est déjà endettée à 114 % de son PIB (3 345 milliards d’euros) et consacre 67 milliards d’euros d’argent public cette année au paiement des intérêts de ses emprunts.
Elle pourrait, dans les prochaines années, dépenser plus de 100 milliards d’euros par an du budget de l’État pour enrichir ses créanciers.
Qu’achète-t-on quand on achète de la dette française ?
- Des obligations (parts de la dette de l’État) qui offrent un certain rendement (comme 3 % par an) pendant une durée définie (par exemple 10 ans).
- En vendant des obligations, l’État emprunte auprès de l’acheteur, à qui il devra verser des intérêts (ici 3 % par an) et rembourser le capital investi à l’échéance.
Cas concret : si je prête 100 000 euros à l’État avec une échéance à 10 ans et un rendement de 3 %, je gagnerai 3 000 euros chaque année (100 000 × 0,03), soit 30 000 euros sur la période (+30 % sur 10 ans).
Pourquoi ça fonctionne pour la finance ?
Les marchés financiers ont deux principales garanties pour faire confiance à la solvabilité de l’État et continuer à acheter de la dette.
D’abord, la dette publique française est détenue pour une bonne part par des banques et assurances françaises (45 %) qui ne vont pas arrêter de prêter à l’État. Elles le font avec l’argent des Français ! Par ailleurs, les investisseurs parient que la Banque centrale européenne peut intervenir en dernier recours pour acheter des obligations françaises.
Ainsi, le plus probable, si l’État est en difficulté pour payer les intérêts de la dette, c’est qu’il emprunte encore davantage auprès d’institutions qui ne peuvent pas se permettre de le lâcher.
Pourquoi c’est un problème démocratique ?
Ce système d’endettement sur les marchés financiers pose un réel problème démocratique :
- Une part toujours plus grande du budget de l’État est versée aux marchés financiers au lieu de financer des dépenses publiques utiles (+10 milliards de charge de la dette en un an). Cela réduit les marges de manœuvre budgétaires et donc les possibilités de choix politique sur le budget de la nation.
- La dette publique coûte de plus en plus cher, car les taux d’intérêt grimpent (de 1 % à 3,5 % depuis 2016 pour les emprunts à 10 ans), ce qui peut inciter les responsables politiques à mener des politiques favorables aux marchés financiers pour limiter cette hausse (et ce sont les travailleurs qui trinquent).
- Les investisseurs étrangers détiennent 50 % de la dette française : la France est pour eux un simple placement sur 5 ou 10 ans, pas leur avenir. Peu leur importe que le pays embauche ou non des enseignants, tant qu’ils obtiennent un bon retour sur investissement. Et c’est eux que Macron et cie doivent contenter !
- Enfin, tout le système repose sur le pari que la Banque centrale européenne viendra au secours de la France en achetant des obligations si nous manquons de liquidités. On est sûrs de ce plan ? La BCE ne demandera rien en échange ? J’ai comme un souvenir…