En six mois, la commission d’enquête sénatoriale voulue par les communistes a auditionné 58 acteurs. Elle a ainsi appelé des ministres (anciens ou actuels), des PDG du CAC 40, des économistes, des partenaires sociaux, etc. Seul l’ancien président François Hollande a refusé d’être entendu comme le lui permet l’ordonnance du 17 novembre 1958 sur le fonctionnement des commissions d’enquête. Il était d’ailleurs « invité » et non « convoqué ».
Quid du CICE de François Hollande ?
Le refus de l’ex-chef d’État apparaît toutefois regrettable. Les membres de la commission souhaitaient en effet l’entendre sur le Crédit impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) qui était une des grandes réformes de son quinquennat. « Je regrette que François Hollande soit le seul à ne pas être venu, d’autant plus qu’il est toujours prompt à prendre la parole et à débattre », a commenté le rapporteur Fabien Gay.
Quoi qu’il en soit, le rapport met en lumière le chiffre de 211 milliards d’aides publiques accordées aux entreprises en 2023 et réparties en 2 252 dispositifs (subventions, exonérations, ristournes, niches fiscales…) C’est le premier poste de l’État, révèlent les sénateurs qui dissipent ainsi le flou sur la question. Il est bon de le savoir alors que le gouvernement s’apprête à détailler ses mesures d’austérité budgétaires pour l’an prochain afin de trouver une économie de 40 milliards d’euros en taillant dans les dépenses publiques.
Reste à savoir précisément comment sont réparties les aides (entre les grandes entreprises et les PME) et sur quels critères elles sont distribuées. D’autant que, ces vingt-cinq dernières années, elles ont augmenté quatre à cinq fois plus rapidement que le produit intérieur brut. Il faut par ailleurs noter que ces 211 milliards n’incluent pas les deux milliards accordés par les collectivités territoriales (toujours en 2023) et les 12 milliards d’euros provenant des fonds européens.
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26 préconisations
Parmi les 26 préconisations que fait la Commission d’enquête, on relève d’abord une exigence de transparence en suggérant que l’Insee réalise un registre recensant les aides avec le nom des entreprises concernées. Les sénateurs avancent aussi l’idée de donner le montant des impôts versés par les entreprises. Mais le secret fiscal et des affaires empêcherait de rendre cette information publique. Une autre recommandation voudrait que les élus du personnel soient informés du détail des aides perçues par leur entreprise.
Par ailleurs, le rapport souhaite rationaliser les 2 252 dispositifs qu’il a recensés et la création d’un guichet unique dans chaque région. Ce dernier serait notamment utile aux petites entreprises. Les rapporteurs se sont en effet aperçus, au cours de leurs travaux, que les grandes structures ont recours à des cabinets pour accéder aux aides publiques. Or, ces cabinets se servent en se rémunérant à hauteur de 20 à 30 % de ces aides. Une aberration que dénonce la commission sénatoriale.
Enfin, cette dernière recommande un véritable suivi et une véritable évaluation des aides. Cela pourrait être confié au Haut-Commissariat à la stratégie et au plan qui publierait un rapport annuel.
D’autres idées intéressantes sont émises comme la conditionnalité des aides et les objectifs de l’entreprise. De la même façon, elle suggère qu’une entreprise qui délocalise rembourse les aides qu’elles auraient perçues. Une société condamnée pour infraction grave ne devrait pas avoir accès aux aides durant deux ans, disent encore les sénateurs.
Parmi les PDG auditionnés par la commission, celui de TotalEnergies s’est fendu d’une défense de l’éthique du capital en conseillant de retirer le montant des aides perçues dans le calcul des dividendes distribués aux actionnaires. Une idée que n’a pas manqué de reprendre la commission.