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Max Zvonarev/shutterstock

Un 25 avril 1974 inoubliable... la Révolution des Œillets au Portugal !

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Mise à jour le 13 mai 2024
Temps de lecture : 4 minutes

Il y a cinquante ans, le 25 avril 1974, le gouvernement de Caetano, successeur de Salazar, tombait grâce à l’action des militaires progressistes, organisés dans le Mouvement des Forces Armées (MFA) et du peuple portugais.

Le Parti communiste portugais (PCP) sortait alors de la clandestinité. Ce parti fut le fer de lance de la lutte contre le fascisme, affrontant sans faiblir la répression, la torture, l’exil… Sous la direction d’Álvaro Cunhal, il se place alors en tête de la lutte pour le socialisme, pour que les promesses d’avril soient tenues et que la révolution ne soit pas confisquée.

C’était il y a 50 ans jour pour jour, le 25 avril 1974 exactement. La Révolution portugaise, dite la Révolution des Œillets, allait abattre le régime fasciste qui régnait depuis un demi-siècle.

Ce jour-là, les casernes du Portugal sont en apparence calmes. Pourtant, des militaires sont prêts à en découdre avec la dictature, qui charrie misère et répression. Marcelo Caetano, l’héritier politique de Salazar, s’entête dans la folie meurtrière des guerres coloniales où les jeunes ne veulent plus mourir. Le régime est à l’agonie, mais reste redoutable.

Il n’est pas encore minuit, ce 25 avril 1974, lorsque retentit à la radio E Depois do Adeus (Et après l’adieu), de Paulo de Carvalho – la chanson qui a fait un flop à l’Eurovision. Mais, ce 25 avril, elle a une autre portée. À son écoute, les visages des militaires se crispent et les respirations se font plus haletantes. La mélodie est un premier code pour les capitaines. Et puis soudain, Rádio Renascença, la radio de l’épiscopat, l’un des trois piliers du régime, diffuse un autre chant :

« Grândola, ville brune/Terre de la fraternité/Seul le peuple ordonne/En ton sein, ô cité (…) À chaque coin de rue un ami/Sur chaque visage, l’égalité/Grândola, ville brune/Terre de la fraternité/Terre de la fraternité/Grândola, ville brune/Sur chaque visage, l’égalité/Seul le peuple ordonne. »

Ces vers ont été écrits en 1964, à la suite d’un séjour de l’artiste José Afonso, dit « Zeca » Afonso, dans cette ville de l’Alentejo, région du sud du Portugal. Ils sont frappés du sceau de la censure salazariste.

Pas de doute possible ; c’est le signal attendu par les militaires qui grimpent dans leurs tanks et filent en direction de Lisbonne. L’opposition politique, du moins celle qui n’est pas derrière les barreaux et le peuple sont présents dans la rue. L’effervescence populaire est à son comble. Les étals des vendeuses de fleurs sont remplis d’œillets. On les offre aux militaires, on les glisse dans les canons des fusils.

Cette révolution, qui n’en était alors qu’à ses balbutiements, a trouvé son nom. En quelques jours, la dictature est défaite sans presque aucune effusion de sang. Le Mouvement des forces armées s’emploie à appliquer un programme qui n’est pas sans soulever de profondes dissensions en son sein : démocratie, développement, décolonisation.

Quant à la chanson Grândola, la terre brune comme la peau tannée des paysans, elle s’est imposée comme l’hymne de la révolution des œillets, une ode à la contestation de l’ordre établi. Pourtant, lorsqu’elle fut rédigée, elle n’avait pas vocation à devenir un tel symbole. L’auteur souhaitait remercier la société musicale Fraternité ouvrière de Grândola pour l’accueil qu’elle lui avait réservé lors d’un concert. Ce n’est qu’en 1971, lors de l’enregistrement de la chanson, que « Zeca » muscle ses vers.

Professeur, il exerce au Mozambique et au Portugal avant d’être expulsé du corps enseignant pour des motifs politiques. Artiste bohème, il dénonce la pauvreté des exploités. Il est dans le collimateur de la PIDE [1], la redoutable police politique, qui le traque et le jette en prison en 1973.

Deux ans plus tôt, lors d’un concert au château d’Hérouville, il a remporté un succès en entonnant sa célèbre chanson, expression de résistance à la dictature. Elle est aujourd’hui érigée au rang de patrimoine national. Et après l’adieu, peut-être moins connue sous nos contrées, est elle aussi devenue un référent pour les Portugais.

« Seul le peuple ordonne ! »

Depuis 1974, à chaque commémoration célébrant le 25 avril, Grandôla est sur les lèvres de toutes les générations. Le 1ᵉʳ mai, les défilés scandent ce poème dépourvu de musique mais rythmé par le bruit de bottes et la puissance d’une chorale composée exclusivement de voix masculines. La ville de l’Alentejo a inauguré, en 2012, un monument à la gloire de ces strophes gravées sur de la faïence et assorties d’un œillet rouge comme ceux brandis en 1974 au cri de « Fascisme plus jamais ! ».

Notes :

[1La Polícia internacional e de defesa do estado (en français : Police internationale et de défense de l’État)

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