Le 21 novembre 1924, une poignée d’ouvrières de l’usine Carnaud cessent le travail, revendiquant une augmentation de 45 centimes de leur salaire horaire. Rapidement, le mouvement s’étend à l’ensemble des 26 usines de Douarnenez, mobilisant plus de 2 000 grévistes, pour l’essentiel des femmes.
Une révolte au cœur de la Bretagne
Surnommées les Penn Sardin (têtes de sardines), ces travailleuses, souvent entrées en usine dès l’âge de 12 ans, enduraient des conditions de travail dignes de « Germinal », comme l’évoque Anne Crignon, auteur d’un ouvrage consacré à cet épisode.
La lutte, prolongée par un hiver glacial, transcende le cadre local et attire l’attention nationale. Des figures du mouvement ouvrier, telles que Lucie Colliard de la CGTU ou le futur ministre communiste Charles Tillon, structurent la mobilisation. Le maire communiste de Douarnenez, Daniel Le Flanchec, met la mairie au service du comité de grève, soutenant les sardinières dans l’organisation de soupes populaires et la prise en charge des enfants. « Ce soutien a permis de transformer une révolte spontanée en une lutte organisée et victorieuse », souligne l’historienne Fanny Bugnon.
Après six semaines et demie de grève, ponctuées de violences de la part des briseurs de grève et de tirs dans un bar de la ville, la détermination des sardinières contraint les patrons à céder. Elles obtiennent une augmentation salariale ainsi que des majorations pour les heures de nuit. Cette victoire reste un symbole de l’émancipation ouvrière féminine.