Pour Simon Bolivar, « C’est ici, au Panama, que Dieu a voulu unir les deux hémisphères ».
Des civilisations anciennes à la « mer du Sud »
Bien avant l’arrivée des Européens, le territoire du Panama était habité depuis près de 12 000 ans par des peuples autochtones tels que les Ngäbe et les Kunas. Ces deux peuples partageaient une forte relation avec leur environnement, utilisant les ressources locales pour leur subsistance et développant des rituels spirituels qui rythmaient leur vie quotidienne. Ces sociétés excellaient dans la poterie, l’agriculture et le commerce. Ces peuples étaient connectés à d’autres civilisations des Amériques, échangeant des biens et des idées qui enrichirent leurs cultures.
Cette richesse culturelle contraste avec l’arrivée brutale des Européens au début du XVIᵉ siècle. En 1501, Rodrigo de Bastidas fut le premier à explorer la côte caraïbe du Panama. Mais c’est Vasco Núñez de Balboa qui, en 1513, réalise une découverte importante : la célèbre « mer du Sud », futur océan Pacifique. Ce moment clé transforme l’isthme en un carrefour stratégique, attirant les marchands et les explorateurs avides de relier les deux côtes.
Un chemin pavé, le Camino Real, reliera bientôt le fleuve Chagres à la ville de Panama, facilitant le transit des richesses venues des Andes, comme l’or et l’argent du Pérou. Cette route, essentielle au commerce transocéanique, devient une source d’enjeux stratégiques et de convoitise pour l’Espagne.
L’ambition d’un canal, un rêve précoce
Dès 1534, Charles Quint conçoit l’idée d’un canal qui relierait l’Atlantique au Pacifique, réduisant le périple des navires espagnols autour de l’Amérique du Sud. L’isthme était perçu comme une épine dorsale du continent, liant non seulement deux océans, mais aussi deux mondes économiques majeurs.
Mais les obstacles technologiques de l’époque, tels que l’absence de techniques modernes de creusement, les outils rudimentaires disponibles et la difficulté à maîtriser les écoulements d’eau et les glissements de terrain, rendent le projet impossible. Les siècles suivants, l’idée revient régulièrement sur la table, portée par l’importance croissante du commerce mondial.
Au XIXᵉ siècle, la France s’y attaque. En 1879, Ferdinand de Lesseps, héros du canal de Suez, lance un chantier colossal. Les écueils s’accumulent : un relief sous-estimé, des épidémies de malaria et de fièvre jaune, ainsi qu’une gestion financière chaotique. En 1888, la faillite de la compagnie ruine près de 85 000 investisseurs, ce qui entraîne des conséquences dramatiques : des milliers de familles européennes se retrouvèrent ruinées. Sur le terrain, les ouvriers locaux et étrangers abandonnent le chantier dans des conditions précaires.
Mais cette tentative a laissé des leçons techniques et humaines qui prépareront le succès futur du canal. Le Panama reste, malgré tout, un carrefour incontournable entre les mondes, préfigurant l’impact mondial du canal au XXᵉ siècle.