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Les membres du bureau du C.N.R - Agence Presse Libération F.F.I. - CC0
26 août 1944

La presse française martyrisée, puis libérée !

Accès libre
Mise à jour le 23 octobre 2024
Temps de lecture : 6 minutes

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Seconde Guerre mondiale

Le 26 août 1944, dès le lendemain de la libération de Paris, le gouvernement investi par la Résistance publiait une série d’ordonnances pour restaurer la presse dans son honneur, sa dignité et son indépendance.

Après la signature de l’armistice du 22 juin 1940, la ligne de démarcation divise le territoire et la presse.

Au nord, l’occupant en fait un outil de propagande pour conditionner l’opinion publique et obtenir, sinon son adhésion, du moins la non-résistance du peuple français.

La Propaganda Staffel instaure des conférences bihebdomadaires pour fixer la ligne éditoriale des journaux, avant d’imposer un éditorialiste dans chaque rédaction.

© Première page du journal L’Œuvre (19 février 1944) - BNF - CC0

Il s’agit de démontrer la puissance de l’Allemagne, l’aspect irrémédiable de la défaite et les avantages de la victoire allemande. Le nazisme est présenté comme un modèle de régime socialiste, socle de la construction d’une Europe garante de paix, constituant un rempart contre l’URSS et le bolchevisme.

La presse écrite est instrumentalisée pour discréditer les adversaires du IIIe Reich : les forces britanniques, l’URSS, et les mouvements résistants dont les actes sont attribués à des étrangers, juifs, ou aux agents de Londres ou de Moscou.

Le dénigrement de la Résistance est particulièrement violent à partir de 1943.

Le 19 février 1944, les journaux collaborationnistes consacrent leurs Unes au procès des membres du « groupe Manouchian », du nom de son chef arménien Missak Manouchian.

En zone sud, si la presse paraît plus libre à l’égard de l’Allemagne, elle est sous contrôle du gouvernement de Vichy qui soutient la politique de collaboration. Il impose des notes d’orientation, censure, et interdit par la loi du 3 août 1940 toute publication et diffusion de tracts clandestins.

La presse clandestine comme moyen de résistance

Dès 1940, pour tous ceux qui refusent la capitulation, s’exprimer apparaît comme une nécessité.

Apporter d’autres éléments d’information et de réflexion que ceux diffusés par une presse sous tutelle apparaît indispensable pour réveiller l’opinion publique. Des hommes et des femmes, messagers de l’espoir et de la liberté, vont ainsi continuer la lutte en utilisant la seule voie qui leur reste : l’écriture.

Dès l’été 1940 circulent en zone occupée comme en zone libre les premiers tracts dactylographiés.

La presse clandestine devient un instrument de combat essentiel dans la lutte du peuple français pour sa libération, d’autant que la feuille clandestine passée de main à main alimente une chaîne de transmission d’informations de bouche-à-oreille.

1200 titres clandestins paraissent pendant les quatre années d’occupation, soit 100 millions de tirages.

L’ordonnance du 26 août 1944

Avant la Libération, le programme du Conseil National de la Résistance prévoit de reconstruire une presse sur des bases économiques et déontologiques saines.

Le gouvernement provisoire installé à Alger prend en 1944 une série d’ordonnances destinées à affranchir la presse de la servilité de l’Occupation, mais également de la corruption et de la vénalité d’avant-guerre, où de grands quotidiens étaient financés par la publicité des industriels.

L’ordonnance du 6 mai 1944 réaffirme la liberté de la presse.

Celle du 22 juin 1944 suspend la parution « de tous les journaux ou périodiques ayant appliqué les consignes de l’autorité occupante ou de l’autorité de fait se disant gouvernement de l’État français ».

L’ordonnance du 26 août 1944 fixe les critères moraux du secteur. Les journaux devront désormais afficher le nom des responsables, indiquer leurs tarifs de publicité, et publier régulièrement leurs budgets et les chiffres de leur diffusion. Nul ne pourra diriger plus d’un quotidien. Toute subvention d’un gouvernement étranger sera illicite. Sur le plan de l’organisation industrielle, la presse sera strictement encadrée, du papier à la distribution.

Autant de mesures supposées favoriser un développement démocratique des journaux.

Que reste-t-il de l’esprit des ordonnances ?

Les différentes ordonnances aboutissent à l’interdiction de la grande majorité des journaux d’avant-guerre, dont les moyens matériels sont redistribués à de nouveaux titres qui célèbrent aujourd’hui leur 80ᵉ anniversaire.

Mais la tentation d’utiliser les médias comme outils de communication n’a jamais vraiment disparu sous la Vᵉ République. La réalité économique d’après-guerre rattrape les rédactions contraintes à chercher des sources de financement, ouvrant la porte à des industriels et à la construction d’empires médiatiques comme celui du groupe Bolloré.

En juin 2024, la dissolution de l’Assemblée nationale a suspendu le projet de fusion de l’audiovisuel public qui menaçait le pluralisme et l’indépendance des médias audio-visuels publics.

En cette année anniversaire où souffle sur nos mémoires le vent d’une liberté reconquise, on ne saurait oublier le programme des Jours Heureux formalisant la protection du journalisme.

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