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21 janvier 1793

L’exécution du roi et l’affirmation de la République

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Révolution

Le 21 janvier 1793, vers 10 h 30, dans le froid humide et neigeux parisien, Louis Capet est exécuté en la place de la Révolution, aujourd’hui place de la Concorde, conformément au décret de la Convention du 17 janvier.

Par Alcide Carton, Président des Amis de Robespierre

Avant de monter avec dignité vers la guillotine, le détenu de la prison du Temple avait pu passer un moment avec sa famille, prier et assister à la messe, enfin recevoir les sacrements d’un prêtre réfractaire. L’événement fut considérable par sa radicalité [1]. Mais comme le souligneront Robespierre et Saint-Just, tous deux régicides, il fut l’expression de la « force des choses. »

Le procès s’imposait

En effet, la monarchie était tombée le 10 août sous la pression populaire des sans-culottes parisiens qui avaient pris d’assaut les Tuileries, laissant beaucoup de morts dans les combats. Louis XVI et les siens avaient échappé à la vindicte populaire, aidés en cela par les brissotins (girondins) alors majoritaires au gouvernement et à la Législative qui lui avaient accordé refuge dans l’hémicycle même de l’Assemblée moribonde. Depuis sa trahison et sa tentative de fuite arrêtée l’année d’avant à Varennes, le 20 juin 1791, le monarque était nu. Et l’idée de la République, sévèrement réprimée au Champ de Mars en juillet, par La Fayette qui émigrera plus tard, suivait son chemin.

Le procès du roi s’imposait tout comme la nécessité d’écrire une nouvelle constitution. L’Assemblée législative, se trouvant sans roi, était devenue caduque. L’intervention populaire imposait une marche en avant encore indécise  ; et sur la pression de Robespierre et de ses amis, le premier suffrage universel ouvert à tous – sauf les femmes – sans avoir à justifier de sa fortune, élisait la Convention qui décréta unanime la République le lendemain de la victoire de Valmy.

Ce n’est donc pas tant le procès en lui-même qui fut l’enjeu d’une bataille politique intense qui divisa la toute jeune convention, mais ses modalités et sa possible issue. Si les conventionnels furent unis pour décréter la République, ils se divisèrent durablement à propos du sort à réserver au désormais citoyen Louis Capet. La République naissante se frayait un chemin débroussaillé par Robespierre et les Montagnards.

La préparation et le procès occupèrent tout le mois de décembre et le début janvier dans un Paris qui vivait dans un climat de suspicion générale et de menaces bien réelles des armées ennemies coalisées.

Le jugement des députés

Fallait-il laisser à la justice ordinaire le soin de juger Capet, fallait-il recourir aux assemblées primaires, donc au peuple (une sorte de référendum pour ainsi dire avec les mots d’aujourd’hui) ou considérer que la Convention représentait la nation et qu’il lui revenait d’instruire le procès  ?

Parmi les manœuvres, surtout inventées par les brissotins, qui espéraient ainsi préserver l’avenir face à une défaite prévisible due à leur impéritie, se garder une monnaie d’échange pour un éventuel retour à une monarchie parlementaire des riches, et mettre ainsi un terme à la révolution, il s’agissait, entre autres, de garder en vie l’accusé. L’emprisonnement, la déportation, la remise à l’ennemi furent évoqués et combien d’autres alternatives. À Aix-en-Provence, dans les clubs populaires, cela fit débat et la mort fut réclamée.

Grâce à l’intervention déterminante du conventionnel Mailhe, le choix d’un jugement par les députés représentants de la nation pour décider de sa culpabilité (« conspiration contre la liberté de la nation, et d’attentat contre la sûreté générale de l’État ») fut retenu  ; chacun des députés devant, comme il se doit, justifier de son vote, pour ou contre la mort.

On connaît l’intervention décisive de Saint-Just complétant l’argumentaire de Robespierre : « Les mêmes hommes qui vont juger Louis ont une République à fonder. Pour moi, je ne vois pas de milieu : cet homme doit régner ou mourir ». […] «  Je dis que le roi doit être jugé en ennemi ; que nous avons moins à le juger qu’à le combattre  ».

Ce jugement historique influera durablement sur la direction que prendra la République une et indivisible de l’An II. Les clivages s’accomplirent et aujourd’hui encore l’on doit continuer de se satisfaire que la condamnation à mort l’ait emporté par 380 voix contre 310. La République continua tout au long du XIXᵉ siècle d’être substituée, puis menacée par les tenants de la monarchie des riches contre la démocratie et le peuple. Sous d’autres formes, les conquêtes sociales et démocratiques de l’an II sont toujours remises en cause au nom du réalisme, du compromis négocié ou du « bon sens capitaliste ». La conception d’un exécutif et d’un président monarque est toujours d’actualité.

Ce week-end, selon la tradition, des citoyens déjeuneront de la tête de veau, boiront un verre de rouge et chanteront la Carmagnole en hommage au peuple sans-culotte, et non au roi, qui par son intervention nous épargne aujourd’hui les grands équipages scandaleux des rois étrangers bien trop nombreux dans les cérémonies officielles de la République.

Pour plus de détails, consulter le site de l’ARBR : www.amis-robespierre.org

Notes :

[1Jean-Clément Martin, L’exécution du roi, 21 janvier 1793, Éditions Perrin, 2024

Olivier Bétourné, La mort du roi, Louis XVI devant ses juges et face à l’Histoire, Éditions du Seuil, 2024

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