En 1493, Christophe Colomb va chercher des plants de canne à sucre aux Canaries et les ramène à Hispaniola. L’île va produire de plus en plus de sucre, mais va rapidement faire face à la concurrence du Brésil. En 1494, un espagnol découvre des pépites d’or dans les monts Cibao, au cœur de l’île. Aussitôt, Christophe Colomb exige de chaque Amérindien de plus de 14 ans la livraison d’une pièce d’or tous les trois mois. Impossible. L’île arrivera tout au plus à produire 276 kg en 1501.
Les esclaves noirs dès 1 502
En 1508, Santo Domingo devient le siège de la vice-royauté des Amériques et le centre de la colonisation espagnole. Les colons font alors venir des esclaves d’Afrique qui arrivent à Saint-Domingue au début du XVI siècle. Hispaniola est exploitée de façon brutale dès l’arrivée des Espagnols.
Désireux de s’enrichir au plus vite avant de rentrer chez eux, les premiers Espagnols reçoivent des terres avec le droit de faire travailler les Indiens qui y vivent. C’est le principe de repartimiento, système de travail colonial imposé à la population indigène de l’empire espagnol. Les esclaves africains débarquent dès 1502 pour remplacer les Indiens dans les plantations et les mines. Indiens et Noirs ne manquent pas de se révolter.
Du génocide à la traite négrière
La recherche de métaux précieux enracine les Espagnols dans ce qui deviendra la République dominicaine. Côté Ouest, malgré le peu de minerai, les Français s’installent petit à petit dans ce qui deviendra Haïti. L’occupation espagnole au XVIe siècle resta limitée à la plaine Sud-Est, autour de Santo Domingo, et à la vallée de Cibao, à cause du manque de métaux précieux. Aussi, à partir de 1625, les Français commencent à s’installer sur l’île de la Tortue, puis dans les petites plaines de la partie occidentale.
En 1697, l’Espagne reconnait à la France la possession de cette région. En 1804, la colonie française devient indépendante sous le nom d’Haïti ; après l’occupation haïtienne de 1822 à 1843, la partie espagnole proclame à son tour son indépendance en 1844 sous le nom de République dominicaine. De la découverte à la possession des terres, les Indiens autochtones et des Arawaks sont pour la plupart massacrés ou tués à petit feu par le travail forcé — ils sont utilisés pour chercher et extraire l’or… qui n’existe pas.
Quelques années plus tard, tous les Arawaks et leurs descendants ont disparu, victimes de la colonisation européenne (travail forcé et malnutrition, persécutions et maladies). Un véritable génocide estimé à 3 millions de personnes.
« Il y a peu de livres dont on ait envie de dire : il faut que vous les lisiez. Si vous mourez sans les avoir lus, vous avez manqué quelque chose d’important. Gouverneurs de la rosée est de ceux-ci. » André Stil, L’Humanité.
Ce roman est paru en feuilleton dès 1947 dans le journal L’Humanité. Il est alors accompagné par des illustrations réalisées par le peintre et dessinateur Max Lingner. Dans Gouverneurs de la rosée, l’écrivain communiste Jacques Roumain dresse un portrait dur, mais réaliste, d’un pays alors en plein chaos.
Mais, ce chaos qui n’a hélas pas évolué dans la bonne direction depuis, ne date pas de cette époque. Pour le comprendre, il faut se retourner vers le début de la colonisation d’Hispaniola.
« Je suis ça : cette terre-là, et je l’ai dans le sang. Regarde ma couleur : on dirait que la terre a déteint sur moi et sur toi aussi. Ce pays est le partage des hommes noirs et toutes les fois qu’on a essayé de nous l’enlever, nous avions sarclé l’injustice à coups de machette. »