Dans l’atelier, dans la rue et jusque dans les chansons populaires, les ouvriers inventent de nouveaux langages pour raconter leur sort. Leur conscience politique ne naît pas d’un seul événement spectaculaire, mais d’une multitude de gestes, de symboles et de créations qui façonnent progressivement un « nous » distinct face à la puissance bourgeoise.
La poésie ouvrière, langue de la dignité prolétaire
Portée par Savinien Lapointe ou Pierre Dupont, la poésie ouvrière s’empare des codes littéraires bourgeois pour dire la misère. En alexandrins, elle raconte la vie rude de l’atelier et l’usure des corps ― jusqu’à devenir cri de ralliement. Surnommée Marseillaise des travailleurs, une chanson de Dupont compare l’ouvrier à une machine, bonne à jeter lorsqu’elle ne produit plus. L’art devient alors outil de prise de conscience : les travailleurs se découvrent un destin commun, opposé à celui des possédants.
Blouse contre habit, quand le vêtement dit la lutte de classes
Au milieu du XIXᵉ siècle, la séparation est…