En Ukraine, l’âge de la conscription est de 27 ans, c’est-à-dire lorsque les gens ont commencé à travailler et à avoir des enfants. On peut comprendre que peu d’Ukrainiens se présentent face au carnage des tranchées qui rappellent la terrible boucherie de la Première Guerre mondiale.
On parle beaucoup dans les médias du manque de munitions d’une Ukraine contrainte de reculer et de se terrer pour tenter de consolider le front. Mais le plus terrible est sans conteste le manque d’Ukrainiens encore mobilisables. Le débat fait rage entre les partisans d’une adoption rapide d’un projet de loi de mobilisation des moins de 27 ans et ceux qui refusent de sacrifier l’avenir de la jeunesse. La supériorité du feu de la Russie est désormais manifeste et fait des ravages dans les rangs ukrainiens. Le courage ne suffit plus à combler une infériorité d’artillerie et de soldats qui se traduisent par des pertes de plus en plus lourdes.
Une hémorragie inquiétante
Les deux ans de guerre ont un effet catastrophique. La natalité dans le pays s’effondre. À la séparation des couples, avec le départ pour l’étranger d’au moins six millions de civils femmes et d’enfants ; s’ajoute la mort des milliers de soldats. Deux ans après le début de l’invasion conduite par la Russie, l’Ukraine continue de voir sa population diminuer, sans espoir de retournement de tendance dans l’immédiat. Selon le Fonds monétaire international, le pays compterait actuellement 33,7 millions d’habitants. Loin des 40 millions du début 2022. Les vies s’échappent d’Ukraine de multiples manières : militaires tués ou disparus au front, soldats faits prisonniers, sans oublier les 6 millions de civils ukrainiens, essentiellement des femmes et des enfants qui ont quitté leur pays.
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D’un côté, l’Ukraine est à court de soldats et de munitions, et de l’autre la Russie avance sur le champ de bataille, après s’être emparée de la ville d’Avdiivka. Peu le savent, mais il faut comprendre ce qu’est une guerre d’usure qui est exercée délibérément par la Russie avec une approche « centrée sur la force », contrairement à une guerre de manœuvre.
Le choix de l’attrition par l’armée russe s’appuie sur une capacité industrielle massive pour permettre le remplacement des pertes et une profondeur stratégique indéniable. Dans les guerres d’usure, les opérations militaires sont façonnées par la capacité d’un État à remplacer les pertes et à générer de nouvelles formations. C’est un des aspects de l’art opératif russe bien connu des historiens militaires. C’est cela qu’il faut entendre et comprendre dans les déclarations de la Russie.
La Russie a clairement fait le choix d’accepter la nature d’usure de la guerre et se concentre sur la destruction systématique des forces de l’armée ukrainienne. Les batailles de Bakhmout et d’Avdiivka témoignent de ce choix. Plus les mois passent et plus les pertes quotidiennes dans l’armée ukrainienne sont supérieures aux renouvellements des soldats. Constat inquiétant qui pousse le pape a appelé l’Ukraine à avoir « le courage de négocier ». Au vu des pertes ukrainiennes, cette question des négociations devient urgente pour l’avenir du pays.