Pendant trois dates, les spectateurs ont pu découvrir la pièce Je suis le vent, dans une mise en scène d’Emma Gustafsson, chorégraphe et metteuse en scène d’origine suédoise qui co-dirige avec Laurent Hatat la compagnie Anima motrix.
La pièce était coproduite par la Comédie de Béthune, le Phénix de Valenciennes, la Manekine de Pont-Sainte-Maxence, dans l’Oise et le Château rouge d’Annemasse.
Lauréat du prix Nobel de littérature 2023, le Norvégien Jon Fosse est aujourd’hui l’un des dramaturges contemporains les plus joués dans le monde. Écrite en 2007, sa pièce Eg er vinden, (Je suis le vent) publiée en 2010 aux éditions de l’Arche dans une traduction de Terje Sinding, avait déjà remporté un grand succès en 2011, lors du festival d’Avignon, dans une mise en scène de Patrice Chéreau.
Je suis le vent fait intervenir deux personnages désignés par les pronoms indéfinis « L’UN » et « L’AUTRE ». La didascalie initiale précise que la pièce « se joue dans un bateau imaginaire et à peine suggéré. Les actions sont également imaginaires et ne doivent pas être exécutées, mais suggérées ».
Par certains égards, le théâtre de Jon Fosse se rapproche de celui de Samuel Beckett. On ne connaît ainsi ni le passé ni la nature des liens de « L’UN » et « L’AUTRE », ce qui laisse la porte ouverte à l’imagination du spectateur : « L’UN » et « L’AUTRE » sont-ils un couple d’amants comme le suggère Emma Gustafsson ? Un père et sa fille ? Un duo d’amis ? Toutes les interprétations restent ouvertes…
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Dès l’ouverture de la pièce, le spectateur est plongé dans un monde onirique, celui de « L’AUTRE », venue du public, qui tente de comprendre les raisons de la mort de « L’UN », qui émerge de derrière un magnolia, en fond de scène où le personnage féminin est venu se recueillir. Je suis le vent est l’histoire d’un adieu, un adieu qui plonge le spectateur dans la tête d’une jeune femme en deuil qui cherche à comprendre pour quelle raison « L’UN » est parti.
Trois moments semblent se détacher dans le texte de Jon Fosse : le duo se trouve d’abord sur le pont d’un bateau avant de s’arrêter dans une crique puis de repartir vers la haute mer dans une métaphore qui évoque le voyage vers la mort, qui survient, tel l’orage, dans un déluge de bruit et de lumière. « L’UN » s’est-il vraiment noyé ? Était-il sur son lit d’hôpital, plongé dans le coma, et a-t-il juste cessé de se battre ? C’est au spectateur de trouver sa propre réponse.
Sur une scène qui figure un bateau surmonté de deux voiles se dirigeant vers une crique, symbolisée par des pierres en papier, Nicolas Martel et Anne Duverneuil, les comédiens et danseurs qui jouent « L’UN » et « L’AUTRE » se parlent, se séparent, se rapprochent, les corps prolongeant les mots des comédiens, dans des chorégraphies simples, mais envoûtantes magnifiées par la musique de Martin Hennart.
Sur le site de la Comédie de Béthune, un dossier pédagogique très complet de la pièce permettra aux enseignants de travailler autour d’un spectacle qui est une des grandes réussites de cette saison culturelle.